Vraisemblablement, le consortium brésilien Andrade Gutierrez ne s'est pas plié aux exigences du ministre des Travaux publics. Le chantier de l'extension du viaduc Transrhumel-Salah Bey est toujours à l'arrêt. Inspectant quelques projets relevant de son secteur à Constantine, le 22 septembre dernier, Abdelkader Ouali a sommé le consortium brésilien de reprendre les travaux d'extension du pont Transrhumel dans un délai n'excédant pas dix jours. Trois semaines après, les travaux n'ont visiblement pas repris et il n'est nulle trace du retour des Brésiliens. A leur décharge, ces derniers ont évoqué un retard de paiement. «Nous n'avons aucune nouvelle des Brésiliens», nous confirme une source proche du dossier. Les extensions prévues à partir de ce pont à haubans, long de 756 mètres, et mis en service il y a un peu plus d'une année, devraient contribuer à la fluidité de la circulation sur les hauteurs est de la ville. En parallèle, elles ont causé d'innombrables désagréments aux quartiers alentours. Les cités Castor, Emir Abdelkader et Al Mansoura subissent, depuis, les affres d'un chantier qui aurait déjà dû être levé, il y a quelque temps. Quotidiennement, les riverains, en raison de la dégradation des routes, chaussées et environnement immédiat, slaloment entre les flaques d'eau et les nids-de-poule pour pouvoir se déplacer. Inutile de préciser que la situation se complique davantage par temps de pluie. Le projet des extensions a aussi quadruplé la congestion de la circulation autour du carrefour de Ziadia, exposant les piétons à de multiples risques. Les habitants de ces agglomérations n'ont eu de cesse d'interpeller, via les colonnes de la presse, les autorités locales «pour boucler ce chantier et les débarrasser de tous ses désagréments». Les plans disparus ! Mais, jusqu'alors, ce n'était qu'un vœu pieux. Depuis le début de l'été, le maître d'œuvre, le consortium Andrade Gutierrez, a mis à l'arrêt foreuses et autres engins de travaux publics. Pis encore, les Brésiliens en pliant bagages, ont aussi emporté avec eux un élément de taille… les plans du projet. Les dommages causés par cette décision unilatérale se sont immédiatement fait sentir. Les deux entreprises nationales, partenaires dans ce projet, à savoir la Sorest et l'EPTP, se retrouvèrent interdites d'accès aux plans, et par ricochet, dans l'incapacité de poursuivre leur tâche. Lorsque Abdelkader Ouali, en visite à Constantine en septembre dernier, a pris connaissance, in situ, de cet impair commis par l'entreprise brésilienne, il est entré dans une colère noire. A l'adresse du seul représentant d'Andrade Gutierrez, encore présent à Constantine, il a déclaré : «Cette entreprise a failli à ses engagements et nul n'a le droit de prendre en otage la population.» Son vis-à-vis exposera un problème de paiement, qui a déjà été soulevé avec le chef de l'exécutif de Constantine, lors des multiples visites d'inspection sur ce site. Il a fallu donc l'intervention du ministre de tutelle pour qu'un consensus soit trouvé ? Pas sûr. Presque un mois s'est écoulé sur un échange de vague promesse «reprise des travaux-paiement», et rien sur le terrain. Le chantier est toujours à l'arrêt. Cette situation n'est pourtant pas inédite. C'est un remake de l'épisode Cojaal, le consortium japonais qui était en charge du projet du tunnel de Djebel Ouahch. Plus de 20 mois se sont écoulés après l'effondrement d'un pan de ce tunnel, le projet n'a pas enregistré une grande avancée dans sa réalisation. La défection des Japonais, qui ont eu recours à l'arbitrage international concernant la résiliation de leur contrat, est à l'origine du renvoi récurrent de la livraison de ce projet et de celui du contournement éponyme. «Nous privilégions un règlement à l'amiable avec Cojaal et les négociations sont toujours en cours», a précisé Abdelkader Ouali, dimanche dernier, lors de la signature d'une convention de partenariat avec les ministères de l'Enseignement supérieur et de la Formation professionnelle. Qu'en sera-t-il pour le cas Andrade Gutierrez ? Toutes nos tentatives pour avoir une réponse auprès de la direction des travaux publics n'ont pas abouti. Mais ce n'est pas sans précédent, quand il s'agit de projets structurants, les autorités locales deviennent peu loquaces.