Sbah el kheir papa… Accompagné d'une larme, d'un baiser et d'un sourire, 22 ans d'absence, de manque et de douleurs, 22 ans que je vois Salima porter ta robe de chambre chaque soir, 22 ans que je vois ta photo sur la table de nuit de Farah, 22 ans que j'entends Mama nous dire que la balle est dans notre camp, 22 ans que tes fidèles amis sont toujours présents, nous suivent, nous conseillent, nous guident, nous écoutent, nous protègent, nous encouragent, nous consolent, nous prennent dans leurs bras et pleurent encore ton absence ; il y a aussi ceux qui refusent encore aujourd'hui de regarder ta photo, ils disent que pour eux tu es en voyage et c'est tout. Cette année fut particulière pour tes filles, une année de réflexion, de remise en question et de doute. Et lorsqu'arrive le 14 octobre, arrive avec lui le moment du constat. Qu'avons-nous fait pour toi cette année ? Qu'avons-nous accompli ? Avons-nous fait les bons choix ? Avons-nous été à la hauteur ? Et Mama dans tout ça ? Elle qui ne t'écrit plus, qui ne s'exprime plus mais qui vient très souvent te voir ? Elle reste observatrice, sans un mot, j ai l'impression qu'elle a pratiquement perdu son sourire et sa joie de vivre, je ne les retrouve que durant la présence de tes petits-enfants. Ces petits-enfants quand ils passent devant ton portrait disent : «Jedou Mostfa.» J'aurais espéré que tu leur fasses connaître et aimer Oued Ezhor, comme tu l'as fait avec nous ; que tu les mettes sur tes genoux pour leur faire apprendre l'hymne national ou encore leur chanter Oum Keltoum. Je le ferai papa, je les emmènerai là-bas, tout en étant en haut de la colline de Beni Fergane, en criant haut et fort… Ya si Mouhamed yaaaw, ya Ben Abada yaw... Je t'aime papa