Les deux unités de la société des fertilisants d'Algérie (Fertial), à Annaba et Arzew, risquent de fermer leurs portes la semaine prochaine. En cause, la saturation des espaces de stockage d'ammoniac en raison de la non-délivrance des autorisations d'exportation, avons-nous appris de Faouzi Zadi, le secrétaire général du syndicat national de cette société mixte détenue à 66% par le groupe espagnol Villar Mir et 34% par Asmidal. «Nos travailleurs s'inquiètent fortement des risques d'arrêt imminents de leurs unités de production d'ammoniac au niveau des sites de Annaba et d'Arzew, et ce, pour impossibilité d'exportation de la production. Cette situation est devenue inévitable compte tenu que la société ne dispose que de capacités de stockage normatives dont un bac 20 000 tonnes métriques à Annaba et un autre de même capacité à Arzew. Par ailleurs, le second bac de stockage d'Arzew est en phase de rénovation. L'intérêt de nos travailleurs est ainsi sérieusement menacé», alerte le partenaire social. L'inquiétude est d'autant plus grande qu'elle concerne également la mise à l'arrêt des installations de production de l'ammoniac et la mise en chômage technique de pas moins de 1300 travailleurs directs et 1200 indirects sans compter le réseau de sous-traitants au niveau des deux sites. «Savez-vous que si nos installations de production s'arrêtent, il faut beaucoup de temps pour les redémarrer ?»tonne le patron du syndicat. Contacté, Stéphane Dieudé, le nouveau directeur général de Fertial, a confirmé l'information : «Effectivement, nous sommes en phase de risque imminent de fermeture de nos deux sites de Annaba et d'Arzew. Cette situation est imposée par l'absence d'autorisation d'exportation de notre produit. Parallèlement, nos capacités de stockage ont atteint leur niveau de saturation. Nous espérons que les autorités nationales nous donneront le feu vert pour éviter cette situation critique tant pour la société que pour ses partenaires.» Incommodante, cette situation l'est à plus d'un titre puisqu'elle intervient au moment où Fertial affiche une grande ambition à l'horizon 2018 à travers un conséquent projet d'investissement, évalué à plus de 360 millions de dollars. Déjà entamé, cet investissement vise, selon sa fiche technique, la rénovation des trois unités d'ammoniac, la fiabilisation et la sécurisation des sites, l'augmentation des capacités de +40% pour les porter à plus de 1,2 million de tonnes d'ammoniac par an. Sur le plan énergétique, il a déjà été procédé à la réduction de 21% de la consommation de gaz par tonne d'ammoniac produite, passant de 45,1 MMBTU/tonne à 35,6 MMBTU/t. Mieux encore, ce plan compte étendre les capacités de production d'engrais pour l'agriculture et de transformation de l'ammoniac. «L'objectif de Fertial dans ce domaine étant de satisfaire au maximum les besoins de l'Algérie en engrais destinés à l'agriculture et d'en diminuer l'importation en cette période de crise», estime la même source. Pourquoi l'Etat algérien fait ce blocage face à l'extension d'un partenariat gagnant/gagnant alors qu'il a cédé devant ArcelorMittal qui a fui le complexe sidérurgique d'El Hadjar, laissant derrière lui une facture salée de 500 millions de dollars ? Rappelons que ce projet d'investissement de Fertial est soutenu par l'Etat puisqu'il a été validé par le Conseil des participations de l'Etat (CPE) ainsi que par le Conseil national de l'investissement (CNI). En cette période de crise, il répond parfaitement aux orientations de la politique économique en permettant d'accroître les exportations et les recettes en devises, de répondre aux besoins de l'agriculture algérienne en matière de fertilisants. Il permettra aussi à la société de faire face aux nouvelles conditions d'exploitation caractérisées par un renchérissement du principal input qu'est le gaz naturel, dont le coût a été multiplié par six à compter du 1er avril 2014. «Depuis la mise en place de ce partenariat en 2005, Fertial a enregistré d'importantes et incontestables réalisations dans divers domaines au bénéfice de toutes les parties prenantes, notamment le personnel de la société, nos partenaires, nos actionnaires, les services fiscaux»,rappelle le secrétaire général du syndicat. De leur côté, d'autres travailleurs regrettent que «pour des raisons hors du contrôle de notre employeur Fertial, la réalisation de cet ambitieux projet est actuellement compromise suite à l'apparition d'un risque réel d'arrêt des unités de Fertial dû à l'absence d'autorisation d'exportation de l'ammoniac». Ainsi, partenaire social et staff management tout comme l'ensemble des personnels de la société s'inquiètent sérieusement des graves conséquences économique et sociale d'une telle situation. De sérieuses incidences sont attendues. Elles se résument en termes de perte de chiffre d'affaires et de clients, de perturbations sociales au niveau des unités et surtout de sérieux risque industriel et sécuritaire traduit par le maintien en l'état plein des bacs de stockage d'ammoniac durant une période indéterminée. Enfin, un arrêt des unités peut constituer un signal négatif vers l'extérieur alors que la société a déjà entamé les premières actions dans le cadre du projet de rénovation de ses unités et qu'elle s'apprête à concrétiser avec son banquier, BEA, un accord de financement de son projet dont la moitié est sur fonds propres