En plein centre-ville de Blida, à Sidi Abdelkader, l'Institut national spécialisé de formation professionnelle (Insfp) forme en contrôle de qualité des produits agroalimentaires. «Ici, les stagiaires apprennent à contrôler les produits de la fourche à la fourchette», instruit Brahim Oussama pour dire que l'enseignement dispensé permet aux apprenants de contrôler la qualité du produit agroalimentaire depuis la matière première jusqu'au produit fini. Dans le laboratoire d'analyses microbiologiques, l'enseignant vacataire encadre une vingtaine de stagiaires en blouse blanche. Dans cette séance consacrée aux apprenants en mode de formation qualifiante (ouverte aux personnes qui le souhaitent ou aux personnels d'entreprises pour une durée de 3 mois à raison d'un jour par semaine), Touhari Messaoud scrute une boîte de Pétri, ce petit récipient utilisé pour la mise en culture de bactéries. «Je fais l'encensement de souches bactériennes dans un milieu synthétique contenant du jaune d'œuf. Je veux voir l'évolution des bactéries dans ce milieu», explique-t-il. Ce stagiaire en fin de cursus de BTS en traitement des eaux, déclare sans ambages sa passion pour ce travail méticuleux. «J'aime les travaux de laboratoire», jubile-t-il. A côté de lui, une jeune femme motive son choix par la qualité de la formation. «C'est un ancien collègue qui m'a parlé de cette formation. Ce qui est agréable dans cet institut, c'est l'accès direct au labo. Il y a du matériel que je ne pouvais approcher à l'université», affirme l'universitaire et ancienne employée dans une entreprise spécialisée dans le café. Dans une région, Blida, où l'industrie agroalimentaire connaît un essor réel, de nombreuses sociétés sollicitent l'Insfp pour des formations à la carte dans le but d'assurer une formation continue à leur personnel. «Nous avons aussi des universitaires qui s'inscrivent dans la formule par apprentissage ou en mode formation qualifiante, afin de parfaire leurs connaissances et de bénéficier de l'aspect pratique de leurs domaine grâce à la disponibilité et à l'accessibilité du matériel dans les labos», informe Moussaoui Hassina, sous-directrice de l'apprentissage et de la formation professionnelle continue. S'agissant du niveau BTS, le cursus est plus long (30 mois) et plus complet. Ainsi, les stagiaires inscrits, de niveau terminale scientifique, devront s'attaquer à des modules aussi complexes que la microbiologie, la toxicologie, la nutrition, l'industrie agroalimentaire (IAA), les méthodes d'analyse, les analyses alimentaires ainsi qu'à l'analyse physico-chimique. «C'est une formation très complète. Moi qui aime tout ce qui est scientifique, je suis gâté», se réjouit un stagiaire en fin de cursus. Dans la salle de bibliothèque, cinq «sortants» (stagiaires en fin de cursus) discutent avec une enseignante leurs sujets de mémoire. Et les thématiques choisies sont dignes de thèses de l'enseignement supérieur avec, en prime, l'aspect pratique : contrôle de la qualité de la confiture de figues et production de pâtes alimentaires ou de cookies pour personnes atteintes de la maladie cœliaque (intolérance au gluten) qui touche quelque 500 000 personnes «déclarées» selon l'Association des patients cœliaques d'Alger. «La gamme des produit alimentaires pour certaines maladies sont très pauvres. Il faut penser à ces gens. J'aimerais suivre tout le processus de mon produit (pâtes alimentaires pour malade cœliaque) et trouver une entreprise qui le commercialise», ambitionne une jeune femme dynamique. «Le choix des sujets de thèse se fait généralement lors du stage pratique. Une fois le stagiaire dans l'entreprise, cette dernière présente ses besoins et après, c'est aux stagiaires de tenter de répondre à ces requêtes», explique Mellak Chaouki, chef du service formation. Mais quelles perspectives après le diplôme ? «Le domaine du contrôle de qualité des produits agroalimentaires est en plein essor. La formation ouvre la voie à toutes sortes de postes que ce soit dans l'agroalimentaire, la cosmétique, le traitement des eaux ou encore l'industrie pharmaceutique. Beaucoup d'entreprises, pour se conformer aux normes ISO, ont installé leurs propres laboratoires de contrôle. Ils ont donc besoin de nos BTS», assure Moussaoui Hassina. Par ailleurs, les diplômés peuvent se lancer à titre personnel dans ce créneau porteur, même si l'investissement reste lourd : «5 millions de dinars pour un petit laboratoire de contrôle et près de 30 millions pour un bon labo», selon la sous-directrice. Mais à 3000 DA l'analyse classique d'un produit et entre 12 000 et 20 000 DA pour les protéines, le retour sur investissement est presque garanti. Pour ceux qui ne veulent pas prendre de risque, il reste encore des postes d'inspecteur ou de contrôleur dans les directions de contrôle des prix (DCP). Justement, l'enseignant vacataire est un ancien inspecteur de contrôle qualité. De son expérience professionnelle, Brahim Oussama retient que les normes de contrôle (texte de loi) sont très appréciables mais il regrette le manque d'application de ces règles et la mauvaise culture de consommation chez le citoyen. «On ne peut pas répéter à tous les commerçants de se laver les mains ou de vérifier leur réfrigérateur. Et on ne peut pas dire non plus au citoyen de ne pas acheter des produits exposés au soleil, à même le sol. J'ai même eu des cas où des clients attendaient, impatients, que je termine mon PV pour un commerçant indélicat afin de faire leur commande», déplore-t-il. En attendant des jours meilleurs et la conscientisation de la société en termes de culture de consommation, il faut savoir que le contrôle de qualité des produits alimentaires est une activité indispensable pour la santé publique. Selon une étude de l'OMS (2010), la morbidité imputable aux maladie d'origine alimentaire due à 31 agents pathogènes, bactéries, virus, toxine et autres produits chimiques touche près d'une personne sur 10 dans le monde. En Algérie, on déplore chaque année quelque 4000 décès dus aux intoxications alimentaires. D'où l'importance de l'INSFP de Blida.