Le palais de la culture Moufdi Zakaria a accueilli une soirée medh animée par la troupe Aïssaoua de Zinedine Benabdellah dans le cadre de son programme culturel et artistique de Ramadhan. Le public algérois était nombreux pour ce rendez-vous sachant que la troupe détient une grande notoriété à Constantine mais aussi dans le reste du pays. C'est donc dans l'ambiance feutrée de l'auditorium du palais de la culture que la troupe, traditionnellement vêtue, commence sa soirée pour un spectacle très attendu. La première partie de la soirée fut consacrée au medh, chants religieux, avant que la troupe ne commence l'interprétation de quelques chansons du diwan Aïssaoui, bien sauvegardées par les multiples confréries de Aïssaoua, et ce, depuis plus de cinq siècles. La belle voix de Zinedine Benabdellah enchante alors l'assistance toute conquise et toute ouïe. Il faut dire, pour la précision, que le chanteur de la troupe est issu d'une longue lignée d'artistes constantinois ayant baigné dans le malouf, le haouzi et d'autres musiques citadines. En début de la seconde partie de cette soirée, quelques bendirs s'éclipsent pour laisser place aux tambours et karkabous. Et cela pour l'interprétation de morceaux tirés du diwan el ouesfanes où l'on retrouve des textes, des rythmes et des instruments spécifiques. Ce style musical a été introduit à Constantine depuis plus de 1000 ans, bien avant l'apparition des confréries Aïssaoua. Ce style a aussi une ressemblance flagrante avec le diwan du sud et le gnawi. Pour cause, il a été introduit par les ouesfanes mêmes, esclaves soudanais implantés au Sud-Ouest algérien. C'est sur ces rythmes effrénés, qui mènent souvent à la transe, que la soirée se clôture, après une longue ovation d'un public en quête d'originalité et d'authenticité. Il faut rappeler que la première édition du Festival national des Aïssaoua, prévue en début de mois à Constantine, a été reporté d'où la frustration du public d'assister à des soirées qui auraient pu donner un meilleur aperçu de ce style. Mais les problèmes internes ont fait capoté un festival, dont on attendait beaucoup, ne serait-ce que pour perpétuer un genre qui a traversé plusieurs siècles, sauvegardé par plusieurs générations, porté par de très nombreux adeptes mais qui vient de buter aux contraintes administratives et aux incompréhensions de ses artisans. C'est pour cette raison que la soirée du palais de la culture était attendue par un public qui voulait répondre présent à un défi, celui de voir « aïssaoua » enjambé allégrement les problèmes et pouvoir programmer d'autres succès, comme cela a été le cas jusqu'à aujourd'hui.