Doha a jusqu'ici rejeté implicitement la liste de ses adversaires en la jugeant maximaliste et attentatoire à sa souveraineté. Le Qatar a aussi contesté la véracité des faits qui lui sont reprochés, dont notamment ceux se rapportant au soutien et au financement du terrorisme. L'ambassadeur des Emirats en Russie, Omar Ghobash, a prévenu cette semaine que de nouvelles sanctions étaient possibles dans le cas où le Qatar refuserait de satisfaire les exigences de ses voisins. Outre une éventuelle suspension du Qatar du CCG, ses adversaires pourraient demander à leurs partenaires commerciaux de faire un choix : continuer à traiter avec eux ou avec le Qatar, a-t-il indiqué au quotidien britannique The Guardian. De son côté, le Qatar n'a pas attendu l'expiration du délai supplémentaire que l'Arabie Saoudite et ses alliés lui ont accordé hier. Doha a transmis au Koweït sa réponse à leur liste comportant 13 exigences, dont, entre autres, la fermeture de la chaîne d'information continue qatarie Al Jazeera et d'une base turque à Doha. La réponse, dont la teneur n'a pas été révélée, était contenue dans un message de l'émir du Qatar, cheikh Tamim Ben Hamad Al Thani, à l'émir du Koweït, cheikh Sabah Al Ahmad Al Sabah. La lettre a été remise en main propre par le chef de la diplomatie du Qatar, cheikh Mohamed Ben Abderramane Al Thani, au cheikh Sabah. Dans un communiqué conjoint rendu public dimanche, l'Arabie Saoudite, les Emirats arabes unis, Bahreïn et l'Egypte ont indiqué qu'ils allaient étudier et évaluer la conformité de Doha à leurs demandes avant de remettre leur propre réponse au Koweït. Les autorités égyptiennes ont fait savoir que les ministres des Affaires étrangères des quatre pays se réuniront demain au Caire pour faire le point et décider «des démarches ultérieures concernant le Qatar». Riyad et ses alliés ont rompu le 5 juin avec l'émirat gazier l'accusant de soutenir «le terrorisme» et de se rapprocher de l'Iran, un pays avec lequel l'Arabie Saoudite entretient des relations exécrables. Doha a jusqu'ici rejeté implicitement la liste de ses adversaires en la jugeant maximaliste et attentatoire à sa souveraineté. Le Qatar a aussi contesté la véracité des faits qui lui sont reprochés, dont notamment ceux se rapportant au soutien et au financement du terrorisme. «La liste des demandes est faite pour être rejetée», avait déclaré samedi le chef de la diplomatie qatarie. «L'Etat du Qatar (...) la rejette par principe», avait-il ajouté, à Rome. Selon des sources à Koweït City, il est peu probable que le Qatar soit sur le point d'obtempérer. Doha espère que les pressions internationales feront fléchir ses voisins. «Le Qatar s'engagera dans un dialogue constructif» avec ses adversaires «si leurs allégations sont soutenues par des preuves claires», avait dit le 28 juin son ministre des Affaires étrangères. Mais les Emirats ont prévenu que l'isolement du Qatar pourrait durer des «années» si les désaccords persistent. Bien qu'abritant la plus grande base américaine dans la région, le Qatar ne peut cependant pas trop compter sur Washington, seule capitale à pouvoir faire pression sur l'Egypte et l'Arabie Saoudite. Il s'est heurté à des signaux contradictoires de l'administration américaine, Donald Trump lui demandant de «cesser de financer les mouvements extrémistes» et le département d'Etat prônant, lui, le dialogue pour résoudre la crise. Les grands soutiens de Doha sont la Turquie et l'Iran. Ankara a d'ailleurs réaffirmé son soutien au Qatar, deux jours avant la fin de l'ultimatum décrété par l'Arabie Saoudite et ses alliés. Le régime de Recep Tayyip Erdogan a dénoncé, à l'occasion, un embargo qualifié d'«illégal», et semble prêt à aller jusqu'au bout pour défendre le petit émirat. C'est ce qui est ressorti notamment de la rencontre samedi entre le président Erdogan et le ministre qatari de la Défense, en visite officielle à Ankara. Officiellement, le pouvoir turc se dit confiant quant au fait qu'une solution pourrait être trouvée dans les prochains jours, c'est ce qu'a annoncé la Présidence turque samedi. Mais derrière le ton diplomatique optimiste, Ankara, tout comme son allié qatari, n'entend pas faire de compromis : hors de question, par exemple, de fermer la base militaire turque dans l'émirat. C'est pourtant l'une des exigences de l'ultimatum. Un ultimatum qui a d'ailleurs été dénoncé par le président Erdogan comme étant «contraire au droit international». La Turquie est donc prête à défier les puissances régionales, l'Arabie Saoudite en tête, pour défendre Doha. Ankara semble faire le pari que le Qatar pourra même résister à un embargo renforcé si la Turquie maintient son soutien.