Alors que l'Arabie saoudite et ses alliés mettent la pression sur le Qatar pour qu'il accède à leurs nombreuses exigences, Doha a remis lundi une réponse écrite au Koweït, qui joue le rôle d'intermédiaire dans cette affaire. La réponse était contenue dans un message de l'émir du Qatar, cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani à l'émir du Koweït, cheikh Sabah al-Ahmad Al-Sabah. Sa teneur n'a pas été révélée. La lettre a été remise en main propre par le chef de la diplomatie du Qatar, cheikh Mohamed ben Abderramane Al-Thani, au cheikh Sabah, a indiqué un responsable du Golfe. A l'expiration dimanche à minuit de cet ultimatum de 10 jours, le Qatar a promis sa réponse pour lundi. Koweït a ensuite demandé un délai supplémentaire de deux jours, que l'Arabie saoudite, les Emirats arabes unis, Bahreïn et l'Egypte ont accepté en indiquant dans un communiqué conjoint qu'ils allaient étudier et évaluer la conformité de Doha à leurs demandes avant de remettre leur propre réponse au Koweït. Mercredi, les ministres des Affaires étrangères des quatre pays se réuniront au Caire pour faire le point et décider "des démarches ultérieures concernant le Qatar", selon les autorités égyptiennes. Doha a jusqu'ici rejeté implicitement la liste de ses adversaires --exigeant notamment la fermeture de la télévision Al-Jazeera et d'une base militaire turque ainsi que la réduction des relations avec l'Iran-- en la jugeant maximaliste et attentatoire à sa souveraineté. "La liste des demandes est faite pour être rejetée", avait déclaré samedi le chef de la diplomatie qatarie: "l'Etat du Qatar (...) la rejette par principe", avait-il ajouté, à Rome.
Trump intervient Le président américain Donald Trump, qui s'en est pris par le passé au Qatar, a répété dimanche "l'importance de stopper le financement du terrorisme", un objectif qu'il juge "primordial", et "de discréditer l'idéologie extrémiste", lors d'entretiens téléphoniques séparés avec le roi d'Arabie saoudite, le prince héritier d'Abou Dhabi et l'émir du Qatar, selon un communiqué de la Maison blanche. Pour sa part, le ministre allemand des Affaires étrangères Sigmar Gabriel à appelé à un "dialogue sérieux" entre les acteurs de la crise, au début d'une tournée qu'il entame lundi en Arabie saoudite et qui le conduira ensuite aux Emirats et au Qatar. Ryad et ses alliés ont rompu le 5 juin avec l'émirat gazier l'accusant de soutenir "le terrorisme" et de se rapprocher de l'Iran chiite, rival régional du royaume saoudien, chef de file de l'islam sunnite. Doha a rejeté ces accusations, en refusant de se faire dicter sa politique étrangère. Le petit émirat, riche de ses ressources gazières et aux ambitions sans limite, a toujours fait cavalier seul en politique étrangère, bien qu'appartenant au Conseil de coopération du Golfe (CCG). La diplomatie, les médias et le sport sont les mamelles du statut que le Qatar s'est efforcé de bâtir et qui est devenu, au fil du temps, insupportable pour ses voisins. L'ambassadeur des Emirats en Russie, Omar Ghobash, a prévenu cette semaine que de nouvelles sanctions étaient possibles. Outre une éventuelle suspension du Qatar au CCG, ses adversaires pourraient demander à leurs partenaires commerciaux de faire un choix: continuer à traiter avec eux ou avec le Qatar, a indiqué l'ambassadeur au quotidien britannique The Guardian. Exaspérés par le soutien ouvert du Qatar aux islamistes en général et aux Frères musulmans en particulier et par le ton irrévérencieux d'Al Jazeera, ses voisins du Golfe avaient fait une première tentative il y a trois ans pour le faire rentrer dans le rang. En 2014, le sommet de Ryad avait vu le jeune émir qatari Tamim promettre entre autres de renvoyer les figures islamistes accueillies dans son pays et d'atténuer la tonalité jugée agressive par ses voisins d'Al Jazeera. Mais hormis le départ annoncé de quelques figures islamistes, rien n'a changé, affirment les détracteurs de Doha. Au début de crise actuelle, Doha a fait le dos rond en espérant que les pressions internationales feront fléchir ses voisins. Mais les Emirats ont prévenu que l'isolement du Qatar pourrait durer des "années" si les désaccords persistent.