Pour la première fois depuis sa création, l'euro a dépassé hier le seuil de 1,44 dollar sur le marché des changes, contre un dollar affaibli par les perspectives de ralentissement économique et de baisse des taux d'intérêt aux Etats-Unis. Sur une année, il s'est apprécié d'environ 14% et progressé contre le yen et la livre sterling. Selon les prévisions des économistes, l'économie américaine, « plombée par la déliquescence du marché immobilier, devrait accuser un ralentissement sévère au quatrième trimestre, quand les effets de la baisse de l'immobilier se feront sentir sur la consommation ». Les marchés parient que la Réserve fédérale américaine (Fed) agira préventivement, dès demain, en baissant son taux d'intérêt directeur, pour donner un peu d'oxygène à la croissance et tenter d'empêcher une récession. La Fed avait déjà baissé en septembre son taux directeur de 5,25 à 4,75%. Elle devrait, cette fois-ci, le porter à 4,50%, voire, selon certaines spéculations, à 4,25%. « La probabilité d'une baisse de 50 points de base d'un coup a augmenté avec la publication récente de données économiques médiocres, en particulier en provenance du marché immobilier », soulignent les économistes de la banque Barclays Capital. Cette baisse des taux diminuera le rendement du dollar, donc l'incitation à investir aux Etats-Unis. Pourtant, soulignent les économistes, certains indicateurs économiques ont montré « un ralentissement de l'activité dans l'industrie, et les premiers signes de pessimisme dans les milieux d'affaires ». Le baromètre de l'institut de conjoncture allemand Ifo, qui mesure le moral des chefs d'entreprise, a reculé. La vigueur de l'euro, elle-même, est souvent citée comme une difficulté supplémentaire, comme c'est le cas chez les exportateurs qui voient diminuer partiellement leur compétitivité. La Banque centrale européenne (BCE) ne semble pas près de baisser, pour autant, son taux directeur établi actuellement à 4%. Alors que son président, Jean-Claude Trichet, ne cesse de mettre en garde contre la persistance des pressions inflationnistes, il semblerait même, selon les analystes, que l'institut monétaire penche pour un dernier resserrement des taux avant la fin de l'année. Un économiste chez Calyon estime que « la fin de la progression de l'euro contre le dollar n'est pas encore à l'horizon ».