Le ministère tunisien de l'Intérieur a affirmé mercredi avoir établi que le groupe jihadiste Ansar Ashariaa préparait l'assassinat d'une vingtaine de personnalités politiques et médiatiques, dont le président de la Constituante, Mustapha Ben Jaafar. Selon une liste publiée lors d'une conférence de presse du ministre Lotfi Ben Jeddou, l'organisation jihadiste visait aussi Ameur Larayedh, un responsable du parti islamiste Ennahda et frère du Premier ministre, les opposants Taïeb Baccouche et Maya Jribi ainsi que les journalistes Sofiane Ben Farhat et Naoufel Ouertani. Des suspects arrêtés "ont confirmé l'existence d'une aile secrète (d'Ansar Ashariaa) pour la préparation d'assassinats et d'actes terroristes", a expliqué M. Ben Jeddou. Selon le ministre, la police a pu déjouer cinq assassinats qui étaient sur le point d'être commis, en particulier celui de Kamel Morjane, un ex-chef de la diplomatie du président déchu Zine El Abidine Ben Ali. "Ansar Ashariaa prévoit d'exploiter l'instabilité dans le pays et d'attaquer des cibles sécuritaires et militaires", a ajouté le directeur général de la sûreté publique, Mustapha Ben Amor. Lors de la conférence de presse, le ministère a diffusé des aveux filmés d'un homme présenté comme l'un des chefs de l'aile militaire d'Ansar Ashariaa, Mohamed Akari, récemment arrêté. "J'ai formé l'organe sécuritaire (d'Ansar Ashariaa) qui collecte les informations (...). On surveille les politiciens, les journalistes, on surveille les cibles", déclare cet homme sur la vidéo en se présentant comme un vétéran d'Al-Qaïda en Irak et un proche d'Abou Iyadh, le chef du mouvement jihadiste tunisien. Le Premier ministre Ali Larayedh avait annoncé mardi que Ansar Ashariaa, un groupe jihadiste toléré jusqu'à présent, était désormais considéré comme terroriste et lié à Al-Qaïda au Maghreb islamique. Selon la police, cette organisation est responsable des assassinats de l'opposant de gauche Chokri Belaïd en février et du député Mohamed Brahmi en août. L'assassinat de M. Belaïd avait entraîné la chute d'un premier gouvernement dirigé par Ennahda. Celui de M. Brahmi a provoqué une profonde crise politique toujours en cours, l'opposition réclamant la mise en place sans délai d'un cabinet apolitique, ce que les islamistes d'Ennahda refusent pour éviter un vide institutionnel, le pays n'ayant ni Constitution ni loi électorale.