Avant de situer les failles du modèle économique algérien, hier, au forum du journal Chiffre d'Affaires, l'expert international en économie, ancien cadre de Sonatrach et professeur en management au Canada, Omar Aktouf, a analysé les systèmes qui prédominent dans le monde. Le néo-libéralisme pratiqué surtout aux USA qui, selon lui, est à l'origine de la crise financière de 2008 et qui sera la cause aussi d'une autre crise qui peut se déclencher à tout moment. « Un système de management et de gestion n'est autre qu'une idée économique qui domine. Or, c'est le néolibéral qui domine et qui est derrière la financiarisation de l'économie. Aujourd'hui, 38.000 milliards de dollars circulent dans le monde, c'est 10 fois plus le produit intérieur brut (PIB) de la planète. C'est une bulle dangereuse qui ne manquera pas d'éclater comme c'était le cas en 2008 », avertit-il. Ce modèle stipule que les profits sont infinis. Ce qui est irréel, d'après cet expert dont les ouvrages sont publiés dans le monde entier. Car on ne peut pas construire l'infini sur le fini, ce qui donne une économie virtuelle, basée sur des spéculations. « La nature ne peut pas satisfaire les besoins infinis car ses ressources sont limitées. Or, sans ces ressources, il n'y a pas d'économie. Le néolibéralisme exige le maximum de la nature. Ce qui la détruit. La nature veille sur l'équilibre et ne reconnaît pas les concepts de maximum, de rareté ou d'abondance », souligne-t-il. Pour l'économiste, dans le modèle néolibéral il n'y pas de marché libre. « C'est un leurre, c'est juste un groupes de personnes qui manipulent les prix et les quantités dans le monde pour s'enrichir. Détruire pour s'enrichir. C'est la doctrine du néolibéral. Détruire les autres pour maintenir le même niveau de vie. C'est ce qui explique ce qui arrive en Irak, en Libye et en Syrie », explique-t-il. De ce fait, il estime que l'Algérie ne peut pas agir comme si elle était en dehors de cette sphère, d'autant que le néolibéralisme est un modèle de corruption officiel qui n‘attire que les pays où dominent les « rapaces ». « Les lobbyistes aux USA sont prêts à détruire la nature pour se lancer dans l'exploitation du gaz de schiste », affirme-t-il. En fin de compte, selon lui, l'Algérie n'a aucun modèle de gestion économique car, pour le moment, elle se contente de vendre son pétrole pour s'acheter à manger. « On pompe, on vend et on importe. C'est en cela que se résume le modèle algérien. En Algérie, ce serait une erreur d'adopter le néolibéral qui engendre des profits rapidement mais qui sont de courte durée et au détriment de simples citoyens », signale-t-il. « Pourquoi ne pas extraire ce qui est bon dans les différents modèles et les adapter ? », s'interroge-t-il, estimant que le capitalisme entrepreneurial, appliqué en Allemagne, au Japon, au Brésil, entre autres, est celui qu'il faut à l'Algérie. Ce modèle se construit sur un partenariat privé-public. Les patrons d'entreprise, les syndicats et même les écologistes et la société civile prennent tous part aux projets du pays. L'entreprise gagne de l'argent mais fait profiter son pays. « Une entreprise patriotique. Certes, les profits ne sont pas à court terme. Mais le gain est sûr et l'entreprise est protégée des aléas des crises financières car leurs financements proviennent des banques et non des bourses », indique-t-il. Même la bourse est protégée dans ce modèle car les entreprises ne peuvent toucher plus que leur valeur réelle. « On peut adopter ce modèle en restant algériens. Les Japonais ont adopté ce modèle et leur culture n'en a pas souffert. Ils sont restés japonais ! », conclut-il.