L'Afghanistan se prépare à prendre en main son destin. A moins d'un mois du départ des troupes de l'Otan, pleinement engagées dans la nouvelle guerre froide contre la « menace russe » et le combat planétaire contre le terrorisme incarné par Daech, la visite d'hier du secrétaire d'Etat à la Défense, Chick Hagel-peu avant son départ du Pentagone-signe la fin d'une mission essentiellement assurée pas les troupes américaines. Une bonne partie (9800 soldats sur les 12.500) sera reconduite après le 31 décembre, pour assurer la formation et l'encadrement de l'armée afghane conformément à l'opération « Soutien résolu ». Aux yeux de Hagel, l'Afghanistan, qui a « fait un long chemin », est désormais éligible à la gouvernance. « Les Afghans vivent bien mieux aujourd'hui. Ils peuvent décider de leur propre sort, de leur propre façon de faire, de leurs propres conditions », a-t-il déclaré à la presse. Présenté comme un opposant à un interventionnisme débridé, le futur ex-secrétaire à la Défense qui sera remplacé par le technocrate Ashto Carter, nommé vendredi par le président Obama, ne cache pas son optimisme sur l'avenir d'un pays appelé, après 13 ans d'occupation, à s'émanciper de la présence étrangère improductive. Mais les signes de l'échec otanien résident aussi bien dans cette visite gardée secrète pour des raisons de sécurité que dans la menace persistante des talibans. Elle sera au cœur des discussions entre le secrétaire d'Etat américain et le président Ashraf Ghani présent, ce jeudi, à la conférence de Londres des 59 pays donateurs perçue par l'envoyé spécial des Etats-Unis en Afghanistan et au Pakistan, Daniel Feldman, comme une « opportunité aux Etats-Unis et à d'autres partenaires internationaux de réaffirmer l'idée que nous restons des partenaires engagés de l'Afghanistan ». Le deal est vite conclu dans cette nouvelle dynamique qui implique une transition sécuritaire fondamentalement tributaire de l'engagement économique occidental. L'Afghanistan qui vit aux 2/3 de l'aide internationale se voit confier le lourd fardeau de la lutte contre les talibans menant une vague de terreur jusque dans la capitale. Plus de 70 personnes ont été tuées et plus de 200 blessés pour le seul mois de novembre. « Il y aura des attaques violentes, y compris l'année prochaine, mais les forces afghanes de sécurité nationale sont capables et le temps est venu de laisser aux Afghans la responsabilité de leur sécurité », a admis le secrétaire général de l'Otan, Jens Stoltenberg. Kaboul conquise et abandonnée à son triste sort ?