Il y a dix ans, le 29 septembre 2005, le peuple algérien optait pour une sortie de crise à travers l'adoption par référendum d'une charte pour la réconciliation nationale. Celle-ci mettra ainsi fin à une tragédie — le terrorisme — qui a décimé des centaines de milliers d'Algériens et d'Algériennes, détruit l'infrastructure économique du pays, endeuillé des milliers de familles. Des familles ont perdu qui un fils, qui le père ou la mère, l'époux sans compter les disparus. Une cellule d'assistance judiciaire pour l'application de la charte pour la paix et la réconciliation fut ensuite installée en juin 2006. Elle avait pour mission d'assister et d'orienter les familles des victimes sur les procédures de mise en œuvre de ce texte. Ce dernier n'est pas figé dans le temps et des juristes, des défenseurs des droits de l'homme escomptent l'approfondissement de ce processus pour un solide ancrage de la culture de la paix et de la tolérance au sein de notre société. Selon le responsable de la cellule d'assistance et d'écoute, citée plus haut, Me Merouane Azzi, un rapport sera remis prochainement au président de la République sur l'application sur le terrain de cette charte. Il devra, précise ce juriste, « comporter nombre de suggestions pour consolider ses acquis ». Ce rapport devra enrichir cette charte en présentant, ajoute Me Azzi, des « recommandations à la lumière des séances d'écoute menées à travers le territoire national depuis 2006 ». La commission souhaite, par exemple, « la révision de l'indemnisation des victimes du terrorisme », le règlement de la question du statut des enfants nés dans les maquis, l'indemnisation des personnes ayant subi des dégâts matériels et économiques durant cette tragédie nationale ainsi que ceux qui étaient détenus dans le sud du pays. La cellule a également suggéré la mise en place d'une « instance permanente ou d'un secrétariat d'Etat » qui aura pour charge d'assurer le suivi des dossiers d'indemnisation. La paix, une réalité palpable Si la charte est l'expression du choix souverain de la majorité du peuple algérien, des voix se sont, cependant, élevées çà et là pour dénigrer ses effets positifs, citant tantôt les attentats de groupes terroristes — bien que résiduels — qui se poursuivent, tantôt le dossier des disparus qui est loin d'être clos. Or, on sait que la charte dans ses dispositions avait exclu du bénéfice de la réconciliation nationale ceux qui avaient les mains tachées de sang. D'ailleurs, les responsables ont toujours soutenu que « la lutte contre le terrorisme se poursuivait toujours jusqu'à son éradication totale ». Quant aux disparus, personne ne peut avancer avec certitude un nombre exact, puisque certaines personnes déclarées par leurs familles comme disparues ont fini par réapparaître de nouveau, soit dans les maquis, soit à l'étranger. En tout cas, ce sont, selon la cellule d'écoute, « plus de 7.100 familles de disparus qui bénéficient d'indemnisation dans le cadre des dispositions de la charte ». Tout compte fait, dix ans après, outre le rétablissement de la paix dans les villes, villages et douars du pays, la paix et la réconciliation nationale se sont de nouveau ancrées dans les mœurs des Algériens comme valeur de tolérance incontournable réunissant les ennemis d'hier autour d'un objectif commun, reconstruire le pays pour un avenir meilleur, apaisé, loin de toute rancœur. Pour preuve, on souligne qu'à la faveur de son adoption, « il n'y a jamais eu de vengeance ou de règlement de comptes ». S'il fallait encore un autre argument pour convaincre les sceptiques, nous leur rappellerons combien de pays, en proie à des actes de violence similaires à ceux qu'avait connus notre pays, se sont aussitôt d'ailleurs intéressés aux dispositions de cette charte qui a laissé loin derrière un des épisodes les plus sanglants de notre histoire.