Trois grandes mosquées du centre-ville étaient ainsi concernées, il s'agit de Djamaâ El Kbir, Hassan Bey et Sidi Lakhdar, des lieux de culte majeurs que ce soit par leur taille ou leur histoire. Des travaux qui s'éternisent. Pire, la plupart des chantiers ont été suspendus ou ayant subi un abandon, au même titre que les autres projets de réhabilitation de la vieille ville, projet entrant également dans le cadre de la manifestation culturelle arabe. Un triste constat observé par les citoyens des quartiers de la Casbah, de la rue Larbi-Ben-M'hidi, du 19-Juin 1965 (ex-rue de France), de la vieille ville Souika ou de la rue Belkacem-Tatache (ex-rue Thiers), inquiets de voir les travaux s'éterniser. Des habitants qui sont obligés aujourd'hui de faire de longs déplacements afin d'accomplir la prière des tarawih en ce mois sacré du Ramadhan. Beaucoup d'entre eux empruntent le tramway pour se rendre à la mosquée Emir-Abdelkader ou celle de Zouaghi, Ibn-El-Arabi, sur les hauteurs de la ville, comme nous l'explique Malek, 42 ans, habitant la Casbah : « C'est une situation très contraignante pour tout le monde. Nous avions l'habitude d'accomplir la prière dans la mosquée Hassan Bey du quartier. Mais après deux années de fermeture, nous sommes obligés de parcourir des kilomètres pour se rendre dans une mosquée qui dispose suffisamment d'espace. Toutes les mosquées du centre-ville sont pleines lors de la prière des tarawih. » D'autres personnes du centre-ville réclament, pour leur part, l'intervention des hautes autorités pour la reprise des travaux. La petite mosquée Abderahman-El-Karoui, située dans le quartier commerçant de Rahbat Essouf, est prise d'assaut chaque jour par les fidèles des quartiers avoisinants, ce qui a contraint les responsables de la mosquée d'aménager le petit espace extérieur pour pouvoir accueillir un maximum de fidèles. Certes, la direction des affaires religieuses a entrepris l'aménagement de la place Si El Houas de la Casbah à l'occasion du mois sacré, mais cette mesure reste insuffisante au vu du nombre important de fidèles que compte toute cette partie de la ville. Sous le couvert de l'anonymat, un responsable exerçant à l'Office de gestion et d'exploitation des biens culturels (OGEBC), qui chapeaute l'opération de réhabilitation de la vieille ville, a accepté de nous éclairer au sujet des mosquées et zaouïas du centre-ville : « Les travaux ont démarré en 2014 et nous avons accordé la priorité aux travaux d'urgence opérés sur les sites menaçant ruine. Nous avons ainsi remarqué que l'ampleur des dommages et des dégâts est plus importante que ce que l'on croyait. Certains édifices menaçaient carrément d'effondrement. » A l'OGEBC, on demeure dans l'incertitude tant que les travaux piétinent encore et on espère surtout un déblocage d'une situation administrative complexe, comme nous le confirme notre interlocuteur : « Le problème est que les bureaux d'études et les entreprises sélectionnés dans les différents chantiers de réhabilitation de la vieille ville n'ont pas été régularisés dans les délais, ce qui a créé un climat de suspicion entre les différentes parties. Par exemple, certains ont vivement critiqué le partenariat avec les bureaux d'études étrangers, arguant qu'ils ont été favorisés. Or, il faut savoir que ce type d'association est une première en Algérie, il a permis un échange de savoir inédit et bon nombre d'entreprises algériennes spécialisées ont bénéficié d'un matériel introuvable, comme les scanners 3D. Il y a eu par la suite des réserves émises, en 2014, par la commission de wilaya chargée de suivre le dossier de la réhabilitation. Des réserves levées fin 2015. Aujourd'hui, c'est du cas par cas et seulement trois entreprises chargées de rénover des mosquées ont été régularisées, les autres attendent toujours de l'être. Et ce n'est pas l'argent qui pose problème, car nous avons dépensé jusqu'à aujourd'hui zéro dinar à cause des entraves administratives. Lorsque, par exemple, nous faisons une découverte archéologique importante, nous sommes dans l'obligation de solliciter les services de sécurité et le Centre national de recherche en archéologie (CNRA). Le site est alors scellé et reste fermé durant des mois, ce qui nous retarde énormément. » Notre interlocuteur avouera que l'ouverture des 19 lieux de culte concernés par l'opération de rénovation attendra encore, du moins jusqu'à l'année prochaine, si bien évidemment toutes les entraves administratives seraient levées.