Tradition n Cet ustensile traditionnel typique de la steppe, en forme de bol, large à la base et un peu plus rétréci vers le haut, est «basiquement» constitué d'alfa, copieusement trempé de «gotrane», substance prisée pour ses capacités antiseptiques. L'eau est le point de mire de tous les regards, à plus forte raison par temps de canicule. Elle est toujours aux couleurs de la passion. L'histoire de l'eau dans le Hodna est tissée aux fils de l'alfa et marquée à la saveur de l'extrait de l'huile de cade (gotrane). L'été, dans cette contrée, est synonyme de «G'nouna», la «marque déposée» de la steppe par excellence. Cet ustensile traditionnel typique de la steppe, en forme de bol, large à la base et un peu plus rétréci vers le haut, est «basiquement» constitué d'alfa, copieusement trempé de «gotrane», substance prisée pour ses capacités antiseptiques. Largement utilisé chez les bédouins, la g'nouna a dépassé les enceintes des kheimas, des chaumières et autres gourbis pour se faufiler, depuis le bourg le plus enclavé, jusqu'à constituer l'ornement des restaurants à la mode au chef-lieu de wilaya de M'sila, ou dans les villes touristiques du Hodna comme Boussaâda. La g'nouna devient le symbole de la générosité et de la «hassana» parfaite : l'offrande de l'eau à l'assoiffé(e). Recouverte ou non, ornée d'une anse ou enserrée dans la main, elle est toujours suspendue à un fil. Adulé pour sa capacité de donner à l'eau la fraîcheur naturelle des sources, et ce goût exquis, inimitable, mariant harmonieusement l'arôme délicat du «gotrane» et la senteur de l'alfa, ce pot est doué d'une propriété isothermique caractéristique de cette plante des steppes. Ignorant l'eau des appareils réfrigérants à la tôle passée à la céramique comme le parquet d'une morgue, le bol rustique affiche une invite muette que rehausse une aura d'ivresse. La g'nouna de grand-père est, décidément, «indétrônable». Chez les Ouled Derradj, au restaurant comme au marché, ou même au détour d'une rue brûlée au soleil de midi, devant un magasin ou une habitation, la mesure est en continu. Ce produit séculaire est incrusté dans le décor comme un grain de beauté sans lequel tout est méconnaissable. Ni le réfrigérateur ni les glacières et encore moins les «clim.», rien n'arrive à limoger ce pot noir aux dehors discrets, pas même dans les lieux les plus privilégiés de cette contrée. «L'eau n'est potable que provenant d'une g'nouna et cela ne date pas d'aujourd'hui, n'est-ce pas Hadj ?», lance l'artisan matelassier, interpellant un vieil homme. Se sentant nargué, l'octogénaire intime à l'adolescent apprenti de lui apporter à boire et de le héler : «Ramène donc une g'nouna !», puis se retournant vers son interlocuteur, il affirma qu'au plus fort des pointes de la canicule, lorsque l'atmosphère devient lourde et l'air irrespirable, «seule l'eau de la g'nouna apaise cette sensation d'oppression».