Création Dans un style berbère original, empreint d?une grande finesse et d?une beauté saisissante, Abdelaziz Bacha laisse exprimer son inspiration. Artiste confirmé à travers le monde entier, dont les ?uvres lui ont valu plusieurs gratifications de l?Unesco et d?autres grands concours internationaux, ce céramiste potier de 36 ans est l?une des incarnations du génie algérien dans l?art de la poterie traditionnelle dont il exploite la richesse des formes et des couleurs. Ce diplômé en sciences vétérinaires a entamé son parcours aux côtés de sa mère qu?il a accompagnée sur des sentiers inédits dans lesquels sa s?ur, sa tante et son oncle se sont également embarqués. Sa recherche perpétuelle d?un nouveau design qui se distingue par un équilibre entre le fond, la couleur et le décor, deviendra sa vertu et son gagne-pain. Mais il voit également son métier comme un combat culturel qu?il livre pour instaurer le respect du travail artisanal. «L?école ne joue pas son rôle dans le respect des arts traditionnels de notre pays. Quand on ignore les conditions de travail de l?artisan et les difficultés auxquelles il est confronté, on ne peut pas connaître la valeur de ses ?uvres même s?ils se distinguent par leur beauté et leur originalité», déclare M. Bacha. L?absence de salles d?exposition et de manifestations culturelles où la qualité et la création sont privilégiées motive la lutte de cet artisan modernisant. Mais le manque de moyens auquel il fait face freine son élan. Selon lui, rares sont les artisans qui possèdent des locaux, la majorité loue à des prix exorbitants. «Or, un atelier doit être vivant. L?artiste doit y vivre pour pouvoir matérialiser à chaque instant ses inspirations. Il m?arrive très souvent de me réveiller au milieu de la nuit avec des idées que j?ai besoin de façonner dans les moments qui suivent. Mais vu que mon local se situe trop loin je m?abstiens tout simplement». L?idée de restaurer des vieux villages et d?y installer des artisans de tout bord lui paraît la solution adéquate pour que l?artisanat renaisse de ses cendres. Mais la réalité du terrain ne lui donne pas trop d?illusions. «Nous avons tenté de créer une association de céramistes, mais il nous faut posséder un local alors nous nous abstenons pour le moment» ,affirme-t-il avec dépit. Il déplore également la situation des artisans illettrés, victimes de mépris de la part des responsables et de ceux qui ne bénéficient d?aucune aide pour participer aux manifestations internationales. Abdelaziz regrette l?absence de considération et de respect pour l?art traditionnel que certains mesurent au volume d?argile que les objets contiennent. A la venue d?un client, il est tout de même soulagé même s?il donne l?impression de ne pas vouloir se séparer de ses ouvrages. Silencieux et calme, il prendra tout son temps pour palper une dernière fois ses pièces qui joignent l?utile à l?agréable et qu?il emballe avec soin et amour avant de les céder au prix de ses longues journées et nuits passées au chevet de son tour à modeler, poncer et décorer ses chefs-d??uvre.