Scène n La mise en scène est opérationnelle. Elle dévoile un jeu naturel, vrai. Le Théâtre régional de Constantine va de l'avant avec la pièce, ‘Laylat el-layali', présentée, hier, en compétition, sur les planches du Théâtre national Mahieddine-Bachtarzi et ce, dans le cadre de la 6e édition du Festival national du théâtre professionnel. Il transgresse les tabous, va au-delà des interdits, abolit les normes déjà préétablies. Tout simplement, sans tergiverser ni retenue, il ose, en abordant différents thèmes sensibles, une parole réduite au silence par les contraintes sociales et les pesanteurs de la tradition, réductrice et inopérante. Il aborde des sujets comme l'adultère, le divorce, la jalousie conjugale – cela finit d'ailleurs par un meurtre –, le suicide et bien d'autres choses liées à la réalité – hypocritement – cachée de la société, ces choses intimes que l'on fait et dont on ne parle pas, qu'on préfère occulter tant cela révèle incontestablement notre profonde nature humaine, notre vérité, notre propre image, celle qu'on refuse, qu'on rejette tant elle est laide, difficile à accepter. Car elle reflète la faiblesse de l'homme, les blessures permanentes d'une société pénalisée par les préjugés… Le metteur en scène, Dhimi Mohamed Tayeb, aborde de manière intelligente, les sujets que fait ressortir la pièce (le texte est de Boudjadi Allaoua). Le rideau se lève sur un plateau de tournage : à l'écart de la scène, un projecteur éclaire la chaise du réalisateur. Cette chaise, bien que vide, est, ô combien, symbolique. L'on assiste alors à un tournage de film. Ce film qui va raconter la pièce à dimension socio-psychologique. C'est l'histoire dramatique de Naoui, bafoué, abusé par sa femme, Bahia, et trompé par son ami, Mohamed. Le plateau est constitué de décors – la scénographie signée Yahia Ben Ammar est chargée de connotations – qui change de style et de référent selon la situation dans laquelle les comédiens se déploient et se développent, conférant ainsi à leur personnage toute l'ampleur scénique. Leur présence scénique est étoffée, rehaussée par la dramaturgie que chacun porte et s'emploie à faire ressentir. La lumière et la musique rendent l'atmosphère théâtrale perceptible, visiblement démonstrative. La mise en espace du texte est prenante, agissante. La mise en scène est fiable, opérationnelle. Elle dévoile un jeu naturel, vrai. Il y a une vérité dans chaque situation décrite en gestuelle tout comme en décor, dans chaque parole dite, directement ou bien implicitement. La séquence scénique est un sens en soi. Une révélation. L'on est saisi par les propos. Quelque chose qui nous séduit, qui nous parle. Le langage théâtral nous interpelle. Il révèle une force de caractère. Tout est dit sur un ton clair, manifeste et avec une franchise pertinente, loin d'être fortuite ou gratuite. La parole nous pénètre, nous habite. Elle nous prend. Elle nous questionne. Cette parole se présente comme un miroir qui renvoie notre image qu'on chuchote et que, parfois, on travestit.