Figure - Kateb Yacine continue de susciter un intérêt significatif et reste, de par son charisme littéraire, théâtral et poétique, une référence. D'où la question : a-t-il une place dans les études universitaires ? «Kateb Yacine reste le grand», dira Saïd Boutadjin, universitaire, et d'ajouter : «Il y a beaucoup d'études actuelles sur Kateb Yacine, et il y a beaucoup de chercheurs qui focalisent sur des aspects différents de son œuvre. Il n'a jamais été oublié par l'université algérienne.» Interrogé sur ce qui fait sa force et son caractère, notre interlocuteur répondra : «Il a un imaginaire assez poussé. Il faut savoir que Kateb Yacine n'a écrit qu'un seul roman : ‘Nedjma'. Et il se trouve que ce roman est magistral dans la mesure où il est la composante, la rencontre ou l'interaction des trois genres littéraires, à savoir roman, théâtre et poésie. Ce qui a donc donné de l'importance et une profondeur à cette œuvre.» Mais c'est surtout sa dimension poétique qui a fait de ce dernier une référence à l'échelle internationale – il est même étudié dans les universités étrangères. Sa poésie on la retrouve d'ailleurs dans ses écrits. «Il était poète avant d'être romancier», soutient-il, et de souligner : «Il l'était tout le temps et il la toujours dit. Même quand il a écrit ‘Nedjma', il a dit que c'était un atelier qui commençait et qui n'allait pas se terminer. L'originalité de son roman, c'est qu'il a d'abord écrit certains poèmes qu'il a collés, par la suite, avec une narration. Il a ramené des aspects du théâtre qu'il a assimilés au roman. S'exprimant sur ‘Nedjma', l'universitaire dira : «Nedjma est devenue en quelque sorte une icône, mais une icône à revoir tout le temps, puisqu'elle nécessite une étude professionnelle et académique pour éviter tout glissement idéologique.» Notre interlocuteur nous dira que ‘Nedjma' revêt une immense portée esthétique et «elle peut être comparée, de par son degré d'importance, à des œuvres de Faulkner, de Proust et d'autres qui ont marqué le panthéon de la littérature universelle. «Elle a le même degré d'importance», soutient-il. A la question de savoir si l'œuvre de Kateb Yacine reste inachevée, Saïd Boutadjin répondra : «‘Nedjma' est effectivement une œuvre inachevée. Peut-être qu'il a essayé de la terminer avec ‘Le polygone étoilé'. Il a essayé, par ailleurs, d'écrire un autre roman, mais il ne l'a pas fait, parce qu'il voulait se consacrer au théâtre. Il l'a même dit. Il a précisé que ‘Nedjma' a été lu par un millier de personnes, alors que ‘Mohamed prends ta valise', a été vu par un million de personnes. Donc c'est une décision, un choix de s'arrêter sur l'écriture dramaturgique et, du coup, laisser de côté le roman.»