Du jour au lendemain, avec une concordance remarquable, toutes les rues marchandes du pays se sont transformées en parkings payants. Elles ont toutes été accaparées par de jeunes adolescents, propriétaires et gardiens autoproclamés de ces artères de la cité. Vous avez juste le temps de vous ranger qu'un jeune homme vous tend un ticket de parking. Cela varie, selon les villes et les emplacements, de 10 à 50 DA. En fait, les tickets ont été confectionnés chez l'imprimeur du coin. Les préposés au parking n'ont aucune patente et ont conquis «leur rue», généralement après une bagarre mémorable ou un calumet de la paix avec une autre bande rivale. Il existe entre ces anges gardiens et les automobilistes comme un contrat tacite : celui qui paie son droit au parking est assuré de retrouver sa voiture intacte, à son retour ; s'il refuse, en revanche, il peut être certain de ne pas retrouver son autoradio, de découvrir ses pneus crevés ou de trouver son pare-brise volé en éclats, inutile de s'en prendre aux «gardiens» parce qu'ils vous répondront avec un superbe aplomb, qu'ils n'ont rien vu et qu'ils ne sont pas payés pour surveiller votre guimbarde. Inutile également de les dénoncer à la police si vous n'avez pas de témoins ni de preuves. Vous perdriez votre temps et l'on vous enverrait paître... Après que les piétons eurent été dépouillés de leurs trottoirs par une faune de commerçants de tout poil, voilà que les automobilistes se font déposséder de leurs rues par des bandes de jeunes désœuvrés qui n'ont trouvé que cette formule pour se faire un peu d'argent. La voie publique n'a plus, pour ainsi dire, de public que le nom. Entre-temps, les pouvoirs publics voudraient qu'on arrête de les agacer avec des riens. Fariza B.