Constat n Des voix s'élèvent pour interpeller les instances concernées afin qu'elles revoient leur politique culturelle et ainsi protéger notre patrimoine matériel – et par extension immatériel – dans toute sa diversité. M'hamed Issiakhem, ce plasticien à part à qui un hommage a été rendu du 1er au 3 décembre dernier à Relizane, sa ville d'adoption, à l'occasion de la commémoration de la 30e année de sa disparition (il est né le 17 juin 1928 et décédé le 1er décembre 1985), est considéré comme un artiste exceptionnel, ayant, avec sa sensibilité créatrice prononcée, révolutionné la peinture algérienne. Il se trouve malheureusement que cet artiste à la dimension universelle est, en dépit de son apport considérable à la peinture algérienne, oublié. Seuls les avertis le connaissent et s'emploient à entretenir sa mémoire et à faire connaître son œuvre. Mais cela ne suffit pas. Car, outre le fait que M'hamed Issiakhem soit ignoré ou oublié, ses œuvres d'une valeur esthétique, marchande, patrimoniale et mémorielle inestimable, sont dispersées un peu partout à travers le monde, entre collectionneurs privés et institutions muséales. C'est ainsi que des voix s'élèvent pour interpeller les instances concernées à revoir leur politique culturelle afin de protéger notre patrimoine matériel – et par extension immatériel – dans toute sa diversité. Les œuvres d'art sont considérées comme un patrimoine. «Nos musées sont vides. Nos musées n'achètent pas d'œuvres d'art», déplorent-ils, à l'instar de Djamila Kabla, guide touristique, coordinatrice du fonds Issiakhem et initiatrice de l'hommage rendu à cet artiste à Relizane. Cette dernière regrette que des musées de pays voisins et même de pays du Golfe fassent l'acquisition d'œuvres d'artistes algériens et en possèdent dans leur fonds, alors que nos musées n'en ont que peu. «Il faut faire attention à ce que notre patrimoine reste en Algérie», dit-elle, et de poursuivre : «Nos artistes ont besoin de considération et de reconnaissance, c'est pour cela qu'il faut leur offrir un environnement propice à leur épanouissement.» Certaines voix vont plus loin, pointant du doigt le laxisme de l'Etat, qui cause un préjudice à l'art algérien. Cela entraîne une perdition de notre patrimoine : à défaut d'un marché de l'art, de mécènes, nos artistes, en quête de considération professionnelle et de reconnaissance financière, sont prêts à vendre leurs œuvres, qui sont des biens culturels, à des collectionneurs ou à des musées étrangers. Ces mêmes voix appellent donc à la création d'un marché de l'art, à plus d'engagement de la part des institutions étatiques ou privées (banques, sociétés…) en faveur de nos artistes et de l'art algérien. Pour Djamila Kabla, la création d'un marché de l'art est une nécessité et il ne serait que bénéfique pour l'art. Il aide à développer l'art en Algérie et à promouvoir nos artistes. Pour elle, c'est un devoir de sauvegarde mémorielle envers nos artistes qui consacrent – ou ont consacré – leur vie au service de l'art algérien et de la culture algérienne. En outre, elle appelle à ce que les collectionneurs algériens mettent leurs collections au service du public à travers des expositions et autres manifestations en mesure de faire connaître l'art algérien dans sa diversité et faire connaître, en conséquence, nos artistes.