Certains indices plaident en faveur d'un tel pronostic. Mis en difficulté sur sa fortune personnelle, Roman Abramovich, l'actuel propriétaire du club anglais de Chelsea, serait vendeur de son joyau, selon une information relayée en mai dernier par le quotidien catalan Sport. Le marché des transferts hivernaux et estivaux des clubs huppés, qui traduit la volonté des clubs à investir, connaît en outre une certaine atonie. Pour l'instant du moins. «L'achat de joueurs représente un investissement, donc une incertitude, et cet investissement n'est amorti que sur la durée du contrat. Donc, il est normal qu'en temps de crise il y ait une certaine prudence côté dépenses, et pas trop de précipitation côté ventes, pour ne pas dévaloriser un joueur qui représente un actif et pourrait être revalorisé par la suite», estime Frédéric Bolotny, économiste du Centre de droit et d'économie du sport (CDES) de Limoges. Très gourmands en ressources financières, les transferts de joueurs sont le miroir comptable des recettes des clubs, aujourd'hui de plus en plus diversifiées. Vincent Chaudel, senior manager en charge du sport du cabinet Ineum Consulting, explique : «L'économie du sport en général et du football en particulier a plusieurs sources de revenus : les droits télé, le sponsoring incluant le “naming” et la “panneautique”, et, enfin, les recettes «public» intégrant la billetterie et le merchandising (maillots, ballons, articles…).» Multiples, ces rentrées d'argent frais dépendent en grande partie de l'audience. Audience directe (remplissage des stades) ou audience indirecte (retransmission à la télévision), c'est elle qui détermine l'appétence des annonceurs à se porter vers un club plutôt qu'à un autre. Le dernier match Lyon-Marseille s'est, ainsi, joué à guichets fermés et a rassemblé 2,5 millions d'abonnés de Canal+. Les stades anglais sont également toujours remplis, Manchester United (MU) accueillant 75 000 personnes en moyenne dans un stade de 76 000 places. «Avec une telle performance, si l'assureur AIG ne pouvait honorer son contrat, nul doute qu'un autre sponsor le remplacerait aisément, éventuellement pour un montant moindre du fait de la crise», analyse Vincent Chaudel. «Tant que les audiences directes et indirectes se maintiendront, le football trouvera des financements. Le foot conserve, à l'évidence, une forte capacité d'exposition et, donc, de notoriété pour les annonceurs. Le vrai problème est qu'il faut disposer de grands stades pour accueillir encore plus de public afin d'accroître le pouvoir d'achat des clubs», conclut-il. Le jeu vaut en effet la chandelle. Un exemple : grâce à l'Emirates Stadium, la capacité d'accueil du club d'Arsenal est passée de 38 000 à 68 000 places, permettant au club anglais de doubler son chiffre d'affaires (billetterie et réceptif d'entreprises). Ce dernier représente, désormais, l'équivalent des revenus de l'ensemble des clubs de L1. Mais la crise «immobilière pourrait remettre en cause les projets de construction de stades», estime Frédéric Bolotny. «Il me semble que le vrai talon d'Achille du football face à cette crise se situe, aujourd'hui, au niveau du financement des stades, qui n'ont plus rien à voir avec ceux d'hier», renchérit Vincent Chaudel. Désormais, les équipements des stades (écrans, éclairages…) coûtent très cher, tandis que le réceptif d'entreprises (loges), particulièrement générateur de revenus, demande également des aménagements particuliers. Problème, le financement de ces véritables complexes de divertissement a souvent été initié par des fonds d'investissements… Avec la crise financière, ils vont être plus frileux.