Par Bahia Aliouche Certes, la production de ciment en Algérie a été multipliée par 12 depuis l'indépendance (1,5 million de tonnes/an) à ce jour mais reste en deçà des besoins grandissants du marché. L'offre, selon M. Abdelkrim Selmane de l'Association générale des entrepreneurs algériens (Agea), n'est pas en mesure de satisfaire la forte demande, «le déficit étant de 5 millions de tonnes/an». Ce déficit en ciment retarde les projets des secteurs du bâtiment et des travaux publics (Btph), obligeant les entrepreneurs à s'approvisionner au marché noir à des prix souvent exorbitants. M. Selmane souligne que la pénurie du ciment se pose de manière récurrente, depuis plus de cinq ans, notamment durant «la période sèche» (avril-octobre) qui connaît habituellement le lancement de projets de construction et des travaux d'aménagement des habitations. Les entrepreneurs sont contraints d'acheter le sac de ciment de 50 kg à 900 DA alors que son prix sortie-usine est à 300 DA. Et ce, pour pouvoir livrer leurs projets dans les délais impartis, regrette ce responsable. Ainsi, pour contrer le phénomène de la spéculation, le ministre de l'Habitat et de l'Urbanisme, Abdelmadjid Tebboune, plaide pour une importation ultra-rapide, seul moyen pour juguler la crise du ciment. «Il faut casser la spéculation par la quantité», insiste-t-il. M. Abdelmadjid Dennouni, président de l'Union générale des entrepreneurs algériens (Ugea), plaide, de son côté, pour une plus grande implication du secteur privé dans l'importation du ciment, estimant que les opérations d'importation de ciment restaient de l'avis de M. Dennouni, «timides». Il est utile de signaler, à ce titre, que durant le 1er trimestre 2013, la facture des importations algériennes de ciment a presque doublé par rapport à la même période en 2012. Celle-ci passe de 36,13 millions de dollars à 68,05 millions de dollars, en hausse de 88,3%, selon les chiffres du Centre national de l'information et des statistiques (Cnis). En volume, les quantités importées de ciment ont plus que doublé, passant de 394 345 tonnes à 795 608 tonnes, soit une hausse de 101,7% durant la même période de comparaison. En 2012, l'Algérie s'est approvisionnée sur le marché international en ciment pour une valeur de 244,4 millions usd (2,701 millions de tonnes) contre 125,537 millions usd (1,361 million de tonnes) en 2011, soit une hausse de 94,67%. Pour les années à venir, l'Etat compte importer en moyenne 1,5 million de tonnes par an, dont le premier quota de 950 000 tonnes devrait être réceptionné début juillet prochain, selon l'avis d'appel d'offres international lancé récemment par le Groupe industriel (Gica). L'importation du ciment demeure une solution provisoire, selon les dires de M. Tebboune qui espère atteindre l'autosuffisance à l'horizon 2015, faisant part de l'ambitieux programme quinquennal de modernisation et de développement des cimenteries publiques mais aussi privées. D'un financement de 365 milliards de dinars (environ 5 milliards de dollars), ce plan porte sur l'extension des capacités de production des cimenteries d'Ain El Kebira, de Béni Saf, de Chlef, de Zahana et de Sour El Ghozlane pour une production supplémentaire de 8,15 millions de tonnes. La réalisation de nouvelles cimenteries notamment à Béchar, Relizane et Djelfa figure également parmi les projets inscrits dans ce programme pour porter la capacité de production de Gica à 20 millions de tonnes en 2016 et à 29 millions de tonnes en 2018. La cimenterie de Relizane, qui produira 2 millions de tonnes par an, sera réalisée en partenariat entre Gica et le Fonds national de l'investissement (FNI) pour la partie algérienne ainsi que par la société chinoise China state construction engineering corporation (Cscec) pour la partie étrangère. D'une capacité d'un (1) million de tonnes de ciment par an, celle de Béchar sera réalisée par le groupe Gica seul. Un projet de construction d'une cimenterie à Djelfa, d'une capacité de production de 3 millions de tonnes, est à l'étude entre Gica et la société égyptienne Asec. Les responsables du groupe sont également intéressés par la réalisation de mini- cimenteries dans le Grand Sud du pays, d'une capacité de production annuelle de 200 000 à 250 000 tonnes, si des gisements sont identifiés. Un autre investissement qui permettrait, selon les responsables de Gica, de maîtriser, voire freiner l'activité des spéculateurs sur le marché, est en cours. Il s'agit de la réalisation de 16 centrales à béton prêt à l'emploi à travers le territoire national ainsi que 9 carrières dont 5 à l'Est 2 au centre du pays et 2 à l'Ouest. Actuellement, le secteur compte 12 cimenteries publiques situées à Hadjar-Soud (Annaba), Ain Kebira (Sétif), Hamma Bouziane (Constantine), Tébessa, Ain Touta (Batna), Sour El Ghozlane (Bouira), Rais Hamidou (Alger), Zahana (Mascara), Béni-Saf (Ain Temouchent), Saida, Oued Sly (Chlef) et celle de Meftah (Blida), fermée en 1972 et remplacée trois ans après par une autre usine dans la même ville. B. A.