Puisque l'événement de la semaine est sportif-l'Algérie étant qualifiée aux demi- finales de la CAN et affrontera ce jeudi l'Egypte, les rendez vous culturel seront légèrement perturbés. De ce fait, les spectacles prévus dans les agendas artistiques de nos structures culturelles ne seront pas annulés, mais seulement décalés. C'est le cas du très attendu concert de Fethi Tabet, initialement prévu pour jeudi et dont la date est avancée pour aujourd'hui afin de permettre aux Algériens de suivre l'une des compétitions la plus palpitantes et la plus décisive qui se jouera demain en Angola. Initié par le Centre culturel français d'Alger (CCF), ce rendez-vous lyrique sera finalement proposé aujourd'hui à partir de 19h, à la salle Cosmos de Ryadh El Feth. A ne pas rater, car non seulement Fethi Tabet qui a déjà fait ses preuves en Hexagone se déplacera pour la première fois dans son pays natal qu'est l'Algérie, mais aussi et surtout ramènera dans ses tambours les meilleurs cuvées de ses créations. C'est aussi l'occasion pour les algériens de connaître une musique profondément africaine qui s'est mêlée à d'autres sonorités et de faire connaissance avec un artiste qui depuis son exil en Hexagone n'a cessé d'étonner le monde du lyrisme. Fethi Tabet est né en 1960 dans la ville de Sidi Bel-Abbès près d'Oran. Sa famille est en revanche de Tlemcen, une autre ville de l'Ouest connue pour ses raffinements et sa longue histoire dans la préservation du patrimoine musicale arabo-andalous. Ayant grandi à Oran, la contrée des chioukh et des chikhates, le jeune Fethi Tabet s'était forcément imprégné de ce tumulte culturel et historique propre à une ville traversée par les influences françaises, espagnoles, sub-saharienne et marocaine. Tout entière, sa vie fut imprégnée de musique au gré des fêtes, mariages, théâtres, cafés et radios qui diffusaient dans sa chaumière familiale où son père était à écoute les chanteurs et les grands orchestres arabo-andalous. C'est en voyant l'un de ces orchestres à la télévision que Fethi âgé de six ans a décidé de façonner son destin : il sera musicien. Sa vie bascule et tout ce qui passera à sa portée sera alors prétexte à jouer. A huit ans, le jeune autodidacte est remarqué par le professeur Hafiane qui découvre stupéfait son oreille et ses aptitudes pour les percussions. Il l'initie aux instruments et lui enseigne les bases de la musique. Paré d'un violon récemment offert par son père, Fethi a onze ans lorsqu'il passe la porte de la grande école arabo-andalouse de Cheikh Sekkal. Il y étudiera chaque jour le chant, la poésie, le violon, l'alto, le luth et les percussions. L'enseignement oral traditionnel qu'il y reçoit, basé sur la rigueur, le travail, l'humilité, le respect, détermineront la suite de son existence. Malgré son jeune âge, ses qualités naturelles de meneur le conduisent en quelques années à la tête de l'Orchestre Renaissance ainsi qu'à la direction de l'école de son maître. Devenu chanteur, musicien et compositeur renommé, Fethi Tabet connaît des années fastes, sillonne le pays avec son orchestre, organise plusieurs festivals dans la région d'Oran et occupe d'importantes responsabilités en Algérie dans la période qui suit la décolonisation. L'exil De sombres circonstances vont l'obliger à quitter son pays pour la France en 1980. C'est à Paris qu'il commence une nouvelle vie, avant de s'installer à Montpellier en 1983. Interprète recherché de musique médiévale, Fethi Tabet devint très vite une référence de la scène française puis internationale en tant que luthiste, percussionniste et joueur de vielle à archet. Il faut attendre les années 1990 pour voir Fethi Tabet revenir sur scène à la tête des ensembles Asswate et Toléré, puis sous son propre nom. De l'Inde à la Chine, en passant par l'Afrique, les Etats-Unis et le Moyen Orient, il n'advient pas une tournée sans que l'artiste ne reçoive un accueil chaleureux. Son groupe est façonné à son image, famille multiculturelle et bigarrée, rompue à toutes sortes d'expériences. Une solide amitié y rassemble des musiciens, tous leaders d'orchestres aux influences musicales diverses, originaires de France, de Tunisie, du Maroc, du Cameroun, du Sénégal, du Mali et du Brésil. Son dernier album " Médité " est la symbiose de toutes les Afriques… Sur des musiques de danse et de fête, les chansons de Fethi nous entraînent au confins de l'Orient et du Maghreb, mais aussi en Jamaïque ou à Cuba. Leurs textes originaux sont chantés en français et en arabe. Le groupe incarne une nouvelle tendance des musiques populaires actuelles qui privilégie la générosité, le contact avec le public et le rapprochement des cultures. Pour clôturer la tournée 2005/2006 de son album 'Medité' et après des concerts aux quatre coins du monde, Fethi Tabet s'est produit une dernière fois au café de la Danse. Son dernier album est la symbiose de toutes les Afriques remplies de danse et de fête. Les percussions et les chœurs tiennent une place centrale tandis que violon, guitare, accordéon et saxophones joignent l'utile à l'agréable autour du luth. Sur scène, Fethi Tabet est le lieu ou se fabrique cette chaleur époustouflante du partage. Par Yasmine Ben