Une délégation de la Croix-Rouge malienne a pu acheminer cinq tonnes de vivres et des médicaments à Tombouctou, ville du nord-est du Mali occupée par différents groupes armés et menacée d'une crise humanitaire, a indiqué, hier, son président, après avoir quitté la ville. “Nous avons remis cinq tonnes de vivres, du riz, à l'hôpital de Tombouctou, des nattes, des couvertures, mais aussi des médicaments”, a déclaré Adama Diarra, président d'honneur de la Croix-Rouge malienne, qui conduisait la délégation, arrivée jeudi dans la ville. “Nous avons quitté Tombouctou et sommes en route vers Bamako”, a-t-il précisé, joint par téléphone en milieu de matinée. La délégation de la Croix-Rouge a pu constater l'urgence de la situation dans la ville, tombée aux mains de groupes rebelles touareg et islamistes armés le 1er avril, dix jours après le coup d'Etat militaire qui a renversé le président Amadou Toumani Touré (ATT). “Il y a urgence. Il faut des vivres, réorganiser le circuit de distribution d'eau potable, d'électricité. Il y a de nombreux déplacés, ils ont besoin d'une aide urgente”, a expliqué M. Diarra. Il a indiqué que les groupes armés avaient confirmé leur accord sur l'ouverture d'un corridor humanitaire, dont ils avaient déjà accepté le principe à condition que les vivres ne proviennent pas de pays comme la France et les Etats-Unis. Nous allons nous organiser rapidement. Les différents groupes armés ont accepté l'idée de l'ouverture d'un corridor humanitaire. Nous allons très rapidement leur envoyer une lettre pour formaliser tout ça. Nous allons aider Tombouctou, mais aussi les autres régions du nord, a assuré Adama Diarra, précisant que les vivres et médicaments offerts par la Croix-Rouge avaient été achetés au Mali. En milieu de semaine, le nouveau Premier ministre du Mali, Cheick Modibo Diarra, avait plaidé en faveur de la création de corridors humanitaires pour les Maliens du nord du pays, les estimant prisonniers de guerre des rebelles et islamistes armés contrôlant cette vaste région. Ces groupes ont profité du coup d'Etat du 22 mars pour accélérer leur offensive lancée depuis mi-janvier et prendre le contrôle des trois régions administratives composant le Nord: Kidal, Gao et Tombouctou, coupant de fait le Mali en deux. D'après divers témoignages, la situation est alarmante pour les populations prises au piège dans ces zones, où ont eu lieu des pillages, saccages et des violations des droits de l'Homme dont des viols. La crise a fait en trois mois plus de 268 000 déplacés et réfugiés, selon l'ONU. La veille, le Parlement européen a adopté une résolution pour demander la création de couloirs humanitaires au Mali, soulignant que, en raison des pillages de leurs installations et de leurs stocks, les organisations humanitaires ont, pour la plupart, quitté la région du Nord. Le nouveau PM Diarra prêt à négocier mais pas le couteau sous la gorge Le nouveau Premier ministre malien Cheick Modibo Diarra, s'est déclaré la veille, prêt à négocier avec les groupes armés qui contrôlent le nord du Mali, mais a exclu toute discussion avec le couteau sous la gorge, dans son premier message à la Nation depuis sa nomination. Dans ce message diffusé par la télévision publique ORTM, M. Diarra s'est particulièrement adressé aux habitants du Nord qui souffrent le martyr du fait d'une agression aussi incompréhensible que barbare, en référence aux divers mouvements armés, dont des rebelles touareg et des islamistes, qui contrôlent depuis fin mars-début avril le nord du Mali. “Pour résoudre la crise, toutes les options sont envisageables, en premier lieu celle de la négociation. Oui, nous négocierons parce que nous haïssons la guerre, et nous négocierons, chers compatriotes, parce que nous n'avons pas peur de négocier, parce que nous n'avons pas honte de négocier. Cependant, nous ne négocierons pas le couteau sous la gorge, en acceptant le fait accompli”, a-t-il déclaré. Le nouveau Premier ministre, qui poursuit ses consultations pour la formation de son gouvernement, s'est fixé comme première priorité, la reconquête totale de l'intégrité du territoire national. Pas un cm2 du sol de la patrie ne restera occupé par qui que ce soit ou quoi que ce soit, a-t-il assuré, soulignant qu'il n'est pas question de se laisser ronger par l'amertume et le désespoir. Il a également estimé que le Mali a souffert d'un déficit de gouvernement et d'une insuffisance de capacité d'anticipation ayant conduit à la situation actuelle, sans accuser directement le régime d'Amadou Toumani Touré (ATT), président renversé le 22 mars par des militaires qui l'ont accusé d'incurie dans la gestion de la crise dans le Nord et de manque de moyens pour les soldats envoyés au front. Pour Cheick Modibo Diarra, aucun sacrifice n'est trop grand pour sortir le Mali de la situation actuelle. Il a promis aux populations du Nord de ne jamais les abandonner. La fin de votre calvaire ne saurait tarder. Elle est pour bientôt, a-t-il dit.