Le rythme des embauches a ralenti aux Etats-Unis en avril pour le troisième mois consécutif, mais le taux de chômage a parallèlement reculé pour revenir à un plus bas de plus de trois ans, brossant un tableau mitigé du marché du travail américain à quelques mois de l'élection présidentielle. Quelque 115 000 personnes ont été recrutées dans le secteur non agricole le mois dernier, a annoncé, avant-hier, le département du Travail, contre 154 000 en mars et 259 000 en février, deux chiffres il est vrai révisés à la hausse (d'un total cumulé de 53 000). Les économistes anticipaient 170 000 créations nettes de postes pour le mois d'avril après les 120 000 initialement annoncées pour mars. "Les attentes étaient trop fortes par rapport à la croissance actuelle. Avec le taux de croissance actuel, le niveau des créations d'emploi se situe autour de 110-115 000. Ce sont donc surtout les anticipations qui n'étaient pas très raisonnables", a commenté Arnaud Poutier, directeur général Adjoint d'IG Markets France. Le taux de chômage, calculé à partir d'une enquête séparée, est revenu à 8,1% de la population active, contre 8,2% en mars et 8,3% en février, un niveau sans précédent depuis janvier 2009 lorsqu'il était à 7,8%. En moyenne, l'emploi a progressé de 197 000 par mois au cours des six derniers mois. "On continue d'avancer doucement", relève Nigel Gault, économiste chez HIS Global Insight. "Les embauches se rapprochent de ce à quoi on peut s'attendre en période de croissance molle." Les marchés ont de leur côté manifesté leur déception, les Bourses européennes creusant leurs pertes, alors qu'à Wall Street, le Dow Jones accusait une perte de 0,95% vers la mi-séance. Les statistiques du département du Travail sont observées à la loupe à la Maison- blanche. La réélection de Barack Obama dépendra en grande partie de la capacité de l'économie américaine à renouer avec une croissance et un emploi forts. Effet saisonnier Son adversaire républicain, Mitt Romney, lui reproche souvent de ne pas en faire suffisamment pour favoriser le retour à l'emploi. Le président de la Chambre des représentants, John Boehner, a qualifié le rapport mensuel sur l'emploi de "preuve supplémentaire de l'échec des politiques pour la famille et les petites entreprises du président Obama qui ne créent pas suffisamment d'emplois pour remettre l'économie sur les bons rails." La Maison-blanche, de son côté, a cherché à mettre la statistique en perspective. Le conseiller économique de la présidence Alan Krueger a expliqué sur CNBC : "un mois ne fait pas une tendance. Je pense qu'il serait plus logique de faire la moyenne des derniers mois. L'économie continue à aller dans la bonne direction." Le taux de chômage, qui a culminé à 10% au cours de la première année du mandat de Barack Obama, est resté proche de 9% pendant presque toute l'année 2011 avant de fléchir au cours de l'hiver. Il reste toutefois de deux points de pourcentage supérieur à son niveau moyen au cours des 50 dernières années et, de l'avis de la Réserve fédérale, il ne devrait pas montrer de vraie reprise avant plusieurs années. Son président Ben Bernanke juge cependant que la Fed en fait suffisamment pour soutenir l'emploi. La difficulté d'établir des prévisions solides sur l'évolution à attendre du marché de l'emploi s'explique par les signaux irréguliers envoyés par les statistiques depuis le début de l'année. Durant l'hiver, l'accélération des embauches a un temps laissé croire aux analystes que la reprise venait de prendre un virage avant qu'un coup de frein se fasse sentir, alimentant les craintes d'un ralentissement de la reprise. Pour la plupart des économistes, la clémence des températures hivernales a brouillé les pistes en soutenant par anticipation les embauches au cours de l'hiver. Au printemps, cependant, les employeurs ont moins recruté, donnant cette sensation d'enlisement.