Abdelaziz Belkhadem aura certainement vécu, en cette fin de semaine, les pires moments depuis qu'il a accédé à la tête du Front de libération nationale à la suite du coup de force de 2004. La conférence nationale des cadres du Mouvement de redressement et de l'authenticité du FLN, tenue jeudi dernier à Draria à Alger, a sérieusement ébranlé la direction nationale du parti. Kamel Amarni – Alger (Le Soir) – Tout a commencé mercredi. Après un premier refus signifié par la Wilaya d'Alger à la demande d'autorisation de la conférence des redresseurs, ce sera, coup de théâtre, l'entrée en lice d'un acteur inattendu qui bouleversera les données : Daho Ould Kablia. Le ministre de l'Intérieur ordonnera en effet l'autorisation de la conférence. Cette implication aussi lourde dans les affaires internes du FLN, le pouvoir ne l'a faite qu'une seule fois de cette même manière. C'était en 2003 lorsque, comble des paradoxes, le mouvement de redressement que conduisait à l'époque… Abdelaziz Belkhadem était ouvertement soutenu par le ministère de l'Intérieur dans sa guerre contre Ali Benflis. Un rebondissement inquiétant pour l'actuelle direction du FLN et qui a mis Belkhadem dans tous ses états. Mercredi, une ambiance électrique régnait au siège du parti à Hydra. Belkhadem n'en revenait pas. Et après plusieurs tentatives de faire annuler la décision d'Ould Kablia, auprès de la présidence et du Premier ministre, le SG du FLN ordonnera, dans un accès de colère, de faire avorter la rencontre des redresseurs en faisant venir des militants de toutes les mouhafadas, nous confie-t-on de source sûre. «C'est à celui qui a autorisé cette rencontre d'assumer ses responsabilités », répliquera Belkhadem à tous ceux qui cherchaient à le dissuader de recourir à une telle extrémité. D'ailleurs, un groupe de personnalités du parti, conduit par l'ancien président de l'APN, Amar Saïdani, signeront une pétition dans ce sens adressée à Belkhadem où ils l'exhortent à éviter la confrontation, la rencontre étant de toutes les façons autorisée par les pouvoirs publics. Vainement. Le patron de l'ex-parti unique aurait même déchiré ce document ! «Celui qui ne se rendra pas demain à Draria est contre moi», aurait également répliqué le ministre d'Etat à d'autres interlocuteurs dans la journée de mercredi. Dans de telles conditions, le décor était planté pour un sérieux risque de confrontation physique, le lendemain jeudi. Le Mouvement de redressement, dont le siège se trouve dans une villa à Draria sur les hauteurs d'Alger, avait choisi comme lieu, pour tenir sa rencontre, une salle des fêtes se trouvant à près de 3 km de la villa. Distance sur laquelle il était toutefois impossible de circulait, jeudi dès les premières heures, en raison de l'impressionnant dispositif de sécurité déployé par Ould Kablia en vue de protéger la rencontre et de dresser un tampon entre les redresseurs et les pro- Belkhadem. L'accès au lieu de la rencontre n'était autorisé qu'à des porteurs de badges dûment estampillés «Mouvement de redressement ». La majorité des pro-Belkhadem, y compris des membres de la direction nationale, venus tôt le matin, finiront d'ailleurs par renoncer à la tentative d'empêcher la rencontre. Tous, sauf un petit groupe d'une vingtaine de personne emmené par un neveu et les deux fils de Abdelaziz Belkhadem et dont l'aîné sera même interpellé par la police avant d'être relâché. Pas d'incidents majeurs donc et la conférence prendra les allures d'une grande rencontre d'un FLN officiel ! Il faut dire que l'autorisation du ministère de l'Intérieur conférait à ce rendez-vous une légalité et une victoire symbolique pour les redresseurs qui ne manqueront pas de faire beaucoup de dégâts au FLN légal. Une année après sa naissance à la mi-octobre 2010, le Mouvement des redresseurs aura réussi, là, une gigantesque progression et menace sérieusement le règne de Abdelaziz Belkhadem. Ils étaient environ cinq cents délégués «cadres du parti» venus des quarante- huit wilayas ainsi que de l'émigration. On y comptait d'anciens ministres comme Salah Goudjil, Mohamed-Seghir Kara, Abderrachid Boukerzaza, Kamel Bouchama, d'ex-membres du bureau politique comme Abdelkrim Abada, Saliha Djeffal, etc, des dizaines entre anciens et actuels parlementaires, d'anciens hauts cadres de l'Etat comme le général à la retraite Abdelmadjid Chérif. «Il y a aussi ceux qui ne sont pas là, aujourd'hui», ironise le porte-parole du Mouvement, Mohamed-Seghir Kara. A titre d'exemple, le ministre de l'Enseignement supérieur, El- Hadi Khaldi. Ou alors l'ambassadeur d'Algérie au Caire, Abdelkader Hadjar, pour ne citer que ceux-là ! Belkhadem-Ould Kablia : le torchon brûle ! Il va sans dire que cette affaire des redresseurs, notamment la conférence autorisée de jeudi dernier, affaiblira considérablement Belkhadem. De l'aveu même d'un membre de la direction nationale du parti, «cette histoire est vraiment louche, inquiétante». Ministre d'Etat, représentant personnel du président de la République, Belkhadem, considéré proche de Bouteflika, n'a pu renverser une décision défavorable du ministre de l'Intérieur. Bouteflika l'aurait-il lâché ? «Inévitablement, cela aura ses répercussions sur la base du parti, très sensible à de telles considérations », avoue encore notre interlocuteur. Rompu aux mœurs et tradition du pouvoir, notre interlocuteur est convaincu qu'«Ould Kablia, tout ministre de l'Intérieur qu'il est, n'aurait jamais pris une telle décision sans l'aval de Bouteflika». Tout comme cette guerre ouverte entre les deux hommes, Belkhadem et Ould Kablia au sujet de la nouvelle loi sur les partis politiques et l'agrément des nouveaux partis. En marge d'une récente réunion du gouvernement, affirme une source bien informée, Belkhadem a interpellé le ministre de l'Intérieur, lui reprochant sa déclaration où il affirmait être prêt à agréer les nouvelles formations politiques même sans l'adoption de la nouvelle loi. «On ne peut pas agréer de nouveaux partis dans une situation de vide juridique », aurait reproché Belkhadem à Ould Kablia qui aurait répliqué : «Eh bien, moi je vais appliquer l'actuelle loi, toujours en vigueur.» K. A. SOURCE Lectures: Laisser un commentaire Pour les commentaires en langue arabe, pressez "Ctrl" + "G" Cliquez ici pour annuler la réponse. (Required) (Will not be published) (Required) (Optional) Notify me of followup comments via e-mail