Il y a tellement de choses qui ont été dites sur le 8 mai 1945 de Sétif, Kherrata, Guelma, livrées à la lâcheté criminelle de l'armée et des milices coloniales, celui des douars soumis au feu du ciel, quand d'autres feux, festifs ceux-là, illuminaient de leurs couleurs les nuits parisiennes et celles de toutes les villes et villages de France. Il y a tellement de choses qui ont été racontées sur les fusillades, sur les exécutions sommaires, sur les lynchages et sur les cadavres amoncelés en charniers, pour l'exemple, quand les bals musettes faisaient vibrer les places des villes et villages de France. Il y a tellement de choses qui ont été écrites, qu'il semble qu'il n'y a plus rien qui vaille la peine de dire, de raconter, d'écrire l'innommable barbarie qui a meurtri à jamais la mémoire algérienne. Pourtant, il faut continuer à en parler, à redire, à répéter et à réécrire, sans cesse. Parce que se taire, c'est lâcher la bride aux criminels, c'est peut-être même leur donner raison. Car la bête est toujours à l'œuvre et ne semble pas près de renoncer. Elle revient plus féroce et plus déterminée que jamais, sous d'autres oripeaux qui cachent mal ses desseins morbides. Elle n'a pas désarmé et n'a jamais cessé de rêver de puissance et de prédation. Elle rode autour de la proie, qu'elle voudrait voir tomber pour l'aider à mourir, pour se vautrer ensuite dans son sang. Elle voudrait même l'aider à succomber. Elle l'y pousse. Au nom des mêmes principes qu'elle brandissait du temps des conquêtes sans risques, quand elle a « civilisé » dans leur sang les « indigènes » à travers le monde. Elle a le sourire aux lèvres et la main sur le cœur, elle crie à la bienfaisance de ses bombardements « révolutionnaires » et de ses guerres « zéro mort ». La bête, la barbarie, qui a massacré hommes, femmes et enfants, notre peuple, il y a 70 ans, il y a 61 ans, il y a 185 ans, tout au long d'un horrible déni de droit, est la même que celle qui chante cette « démocratie » revisitée. Pour cela, ne pas se taire, jamais, convoquer le souvenir, la mémoire des victimes, faire revivre sans cesse le passé de la bête, si réel, si présent, si menaçant. Ce 8 mai 2015, nous ne devrions pas faillir à la mémoire des dizaines de milliers d'Algériens qui ont témoigné et qui témoignent par leur mort, par delà les années, de l'infamie colonialiste. * facebook * twitter * google+