On l'a vu pour nos chômeurs (du sud), cela se confirme pour les agents de sécurité grévistes de Sonatrach. En lutte contre une inique législation du travail inspirée des directives « réformatrices » en vogue, ces agents revendiquent légitimement les mêmes droits dont bénéficient les employés de la société pétrolière. Alertée, une partie de la presse libérale d'ici et de « là-bas » qui fait la vigie pointilleuse donne à l'événement de l'espace dans ses colonnes. Non pas une presse connue pour son soutien au monde ouvrier, mais celle-ci qui est entre les mains de magnats de la finance, et de supplétifs locaux du discours « réformiste », et qui est aux petits soins en matière de propagande patronale, à l'intérieur, et impérialiste, à l'extérieur, El Watan, TSA, Focus Algérie & co. C'est-à-dire celle dont la vocation fondatrice est de vendre l'idéologie libérale et de pourfendre les syndicalistes sauf, de toute évidence, quand il s'agit d'un secteur public stratégique d'un pays qui n'en fait pas assez pour s'ouvrir aux chasseurs de profit. Devrions-nous nous étonner ? Car, à première vue, cela semble quand même bien ressortir de l'hérésie. A première vue seulement, puisque quand il s'agit du privé le traitement des choses est tout autre. Concernant le privé, les camps des protagonistes sociaux ne souffre aucune équivoque et cette presse, patronale par définition, ne déroge jamais dans ses choix doctrinaux à défendre l'ordre établi, celui de la libre-entreprise. A contrario, l'intérêt pour les Algériens obéit, de fait, à des mécanismes spécifiques et exceptionnels. Il n'a de raison d'être que dans la mesure où il s'agit d'épingler l'Algérie, de lui trouver des poux dans la tête et d'en rajouter à la sinistrose médiatique qui doit la caractériser. Le « sud » et la « Sonatrach », par leur symbolique, offrent à ce titre une aubaine inespérée. Tout ce qu'il s'y passe peut augurer d'un début de « problème majeur », d'un craquement annonciateur d'un cataclysme qui emportera ce qui reste d'obstacles aux visées prédatrices des « forces du marché ». Tant pis si, en passant, il faut fustiger ces règles mêmes qui sont dictées par le « Doing business » de la Banque mondiale, en direction du marché du travail, pour le doter de la flexibilité la plus large, en termes d'arbitraire et de liberté des employeurs à fixer, selon leurs propres exigences, les dispositions contractuelles qui les lient à leurs salariés. Le « Doing business » dont le classement est régulièrement rappelé pour dire de l'Algérie qu'elle est l'une des dernières de la classe. Sonatrach, en bon élève, s'y est conformée, en s'en prenant au maillon faible de son personnel, celui qui n'a pas d'impact direct sur son process de production. Mal lui en prend. Tandis que chez ArcellorMital, à El-Haddjar, les mêmes plumes qui larmoient sur le sort des agents brimés des sites pétroliers compatissent avec l'administration du complexe sidérurgique. Le cynisme au bout de la plume, qui fait feu de tout bois, dans une implacable stratégie de promotion de la libéralisation, quitte à donner épisodiquement l'illusion de défendre les opprimés. Ahmed Halfaoui