L'Armée nationale populaire s'est exprimée, à nouveau, hier mardi, sur la crise politique qui frappe le pays, et réitéré ses positions immuables par rapport à la présidentielle, à son refus de toute forme de transition en dehors de la Constitution et appelle à un dialogue « sérieux, rationnel, constructif et prévoyant », en vue de « trouver des solutions idoines sans délai ». Et aboutir à l'organisation de la présidentielle dans les meilleurs délais. Kamel Amarni - Alger (Le Soir) - Des positions longuement développées, ce mardi, par le chef de l'état-major, vice-ministre de la Défense nationale, le général de corps d'armée Ahmed Gaïd Salah, lors d'une intervention devant les cadres de la 6e Région militaire à Bordj-Badji-Mokhtar. Dans son appel au dialogue, Gaïd Salah s'est montré, cette fois, très conciliant, mais ferme sur l'essentiel. Il dira à cet effet : « J'ai affirmé à maintes reprises et je le répète aujourd'hui une fois encore, que l'unique voie pour résoudre la crise que vit notre pays est d'adopter la voie du dialogue sérieux, rationnel, constructif et clairvoyant, qui place l'Algérie au-dessus de toute considération. Car l'établissement du dialogue signifie la disponibilité de tous à s'entendre et s'écouter mutuellement, avec pondération, sérénité, engagement et une aspiration sincère vers la nécessité, voire l'impératif de trouver les solutions idoines sans délai .» Cet appel au dialogue intervient au moment où la date du 4 juillet initialement fixée pour la tenue de la présidentielle tombe de fait. Ce qui fait craindre à l'armée davantage de complications d'une crise déjà assez difficile. C'est ce qui fait dire au chef de l'état-major que « le peuple algérien (…) ne veut plus revivre les expériences douloureuses antérieures, dont il a subi les affres et souffert terriblement des répercussions, tout comme il n'oublie pas et ne veut pas oublier cette période pénible qu'il a vécue durant les années 1990 ». La situation que traverse le pays est tellement cruciale, plaide Gaïd Salah, que « nous devons, en tant qu'Algériens, tirer l'enseignement des expériences et des événements tragiques passés, où la raison était absente ». D'où, insiste-t-il, le devoir « pour les personnalités et les élites nationales, fidèles à la Nation, de participer à ce dialogue. Un dialogue sincère et objectif lors duquel il sera question de l'évaluation des circonstances que vit le pays et de concessions réciproques pour le bien du pays. C'est ainsi que l'on outrepasse les divergences entre les différents avis, ou du moins on réduit les écarts entre les points de vue contradictoires et contrastés, sachant que rien ne s'élève au-dessus de l'intérêt de notre pays ». Plus particulièrement, le chef d'état-major sollicite « les personnalités nationales, qui ont une capacité réelle à apporter la contribution judicieuse de façon à trouver les solutions escomptées. Et les solutions viendront , avec l'aide d'Allah, dans les plus brefs délais , car notre confiance en notre peuple est grande et notre confiance en Allah l'est encore plus , afin d'assister l'Armée nationale populaire dans l'accompagnement des fils de notre patrie, lorsqu'ils présenteront leurs propositions constructives comme le requiert le devoir national. L'Histoire retiendra tout effort ayant contribué à trouver une sortie saine à la crise ». Pour rappel, Gaïd Salah précisait clairement, la semaine dernière, à partir de Ouargla, que l'institution militaire ne prendra pas part au dialogue politique en question. « Une présidentielle loin des périodes de transition aux conséquences incertaines » Il a réitéré d'ailleurs, hier mardi que « comme je l'avais souligné à maintes reprises, je réitère encore aujourd'hui que l'Armée nationale populaire restera immuablement fidèle à son engagement d'accompagner le peuple algérien, les institutions de l'Etat et l'appareil judiciaire ». De même, l'a-t-il répété encore une fois ce mardi : « Je voudrais également souligner, comme énoncé lors de mes précédentes interventions, que nous n'avons aucune ambition politique et que notre aspiration majeure est de servir notre pays et notre armée, conformément à nos missions constitutionnelles, et c'est là une position dont nous ne dévierons jamais .» Par ce rappel, le chef de l'armée tient à démentir, de manière claire et publique, des ambitions personnelles que d'aucuns lui prêtent de vouloir succéder lui-même à Abdelaziz Bouteflika via un scénario à l'égyptienne. Le Haut Commandement de l'armée tenait également à affirmer, par la voix de son premier responsable, que ses positions se basent sur une évaluation minutieuse de la situation. Gaïd Salah affirme à ce propos : « Nous tenons ces propos en toute connaissance de cause car nous considérons la réalité de la crise dans notre pays d'un point de vue réaliste et profond, en prenant en compte ses dessous et objectifs, ainsi que ses répercussions directes et indirectes sur la sécurité et l'avenir de l'Algérie. Nos analyses sont objectives et rationnelles, basées sur notre compréhension et perception de l'enchaînement des événements, ainsi que leurs finalités et principaux objectifs. En cela , nous faisons appel à une vision stratégique fondée sur l'information crédible sur ce qui se passe et la prédiction de ce qui pourrait se passer , ainsi que l'examen approfondi des tenants et aboutissants de cette crise multidimensionnelle .» Insistant encore sur la nécessité du dialogue, le vice-ministre de la Défense nationale et chef de l'état-major affirmera, cela étant, que « la priorité aujourd'hui, et je le redis instamment encore une fois, est que chacun de nous croit en l'importance d'aller vers un dialogue productif qui permet de faire sortir notre pays de cette phase, relativement complexe, qu'il traverse et assure ainsi la voie vers la tenue des prochaines élections dans les plus brefs délais, loin, et je le dis, de périodes de transition aux conséquences incertaines. Car l'Algérie est incapable de supporter davantage de retard (…) La solution est entre les mains des Algériens fidèles à leur patrie et c'est eux qui trouveront la solution à travers, je le répète, le dialogue qui mène à un consensus et un compromis sur l'impératif de l'organisation de l'élection présidentielle, le plus tôt possible ». L'armée estimera même, par la voix de son premier responsable, qu'« il n'y a aucune raison de continuer de perdre du temps, car le temps est précieux et il n'y a pas moyen de le gâcher dans des discussions stériles loin du véritable dialogue sincère et constructif. Rien n'est impossible et l'Algérie attend une sortie légale et constitutionnelle qui la prémunira contre toute forme d'exacerbation de la situation ». En attendant les réactions des uns et des autres, parmi la classe politique, il est, par contre, certain que cet appel de l'armée sera suivi par des décisions et des mesures rapides de la part du pouvoir K. A.