Au risque de d�cevoir l�auteur de la contribution parue dans El Watan du 24 mai, si l�on consid�re les �lections l�gislatives de mai 2002, soit dix ann�es auparavant, le premier enseignement � tirer de ces derni�res �lections est la baisse du taux de participation qui est pass� de 46,17% en 2002 � 43,14% en 2012, en se basant, bien s�r, sur les chiffres officiels et tout en sachant que les �lections de mai 2002 sont les moins entach�es de fraude apr�s les �lections de d�cembre 1991. Sans campagne exceptionnelle bas�e sur la peur et l�instabilit� attribu�e au �Printemps arabe�, l�utilisation de tous les moyens possibles (m�dias, mosqu�es) et les interventions du chef de l�Etat, les Alg�riens ont �t� plus nombreux � voter en 2002 qu�en 2012. Si l�on consid�re les suffrages exprim�s par rapport aux inscrits, la baisse est encore plus substantielle : le taux est pass� de 41,2% en 2002 � 35,3% en 2012. La d�saffection des Alg�riens � l�endroit des �lections est, par cons�quent, une tendance lourde de la vie politique du pays. Le deuxi�me enseignement capital � retenir de ces derni�res �lections est le r�tr�cissement continu de la base sociale du pouvoir : alors que le taux de suffrages exprim�s en faveur du duo FLN-RND par rapport aux �lecteurs inscrits �tait de 18% lors des �lections l�gislatives de mai 2002, ce taux est tomb� � 8,5% en 2012. D�tails tableau ci-apr�s : En dix ans, le pouvoir a perdu plus de la moiti� de sa base sociale. Les �lections l�gislatives interm�diaires de mai 2007 confirment cette tendance : le total de voix FLN/RND a �t� de 1 906 996, par cons�quent inf�rieur � celui de 2002 et sup�rieur � celui de 2012. Cet effritement de la base sociale du pouvoir aurait d� se r�fl�ter sur le nombre de si�ges � l�APN, vu que le mode de scrutin utilis� en 2002 est exactement le m�me que celui de 2012 avec le m�me taux �liminatoire de 5%. Or, au lieu de la baisse attendue du nombre de si�ges, c�est l�inverse qui s�est produit : en 2012, le duo FLN/RND s�est vu attribuer 291 si�ges ramen�s � 276 par le Conseil constitutionnel, contre 247 en 2002, soit 13 210 voix par si�ge en 2002 contre seulement 6 697 voix par si�ge en 2012. Ce qui revient � dire qu�un si�ge de 2002 est �gal � deux si�ges en 2012. R�sultat tout � fait invraisemblable. Une explication de ces r�sultats est avanc�e par les 16 partis contestataires comme suit : vers la fin de la journ�e du 10 mai, il a �t� proc�d� au bourrage des urnes avec des bulletins FLN ou RND, bourrage qui, en permettant l�augmentation du taux de participation, �l�ve en m�me temps le seuil des 5% �liminatoires fatidique pour tous les partis non b�n�ficiaires du bourrage des urnes, laissant le FLN et le RND pratiquement seuls dans la course et b�n�ficiant de surcro�t des si�ges des partis �limin�s par les 5%. D�autres explications moins complexes sont possibles. La seule fa�on de les contredire d�une mani�re incontestable est de revoir les listes �lectorales, examiner le bien-fond� des �margements et refaire le d�compte des voix par commune par une instance ind�pendante. C�est une op�ration tout � fait possible puisque les documents des �lections sont archiv�s. A d�faut de cette op�ration, le doute reste permis, et il n�est pas dans l�int�r�t du pays et de sa stabilit�. Le troisi�me enseignement des derni�res �lections, c�est aussi l�effondrement de l��lectorat islamiste des partis agr��s : en valeur absolue, leurs �lecteurs sont pass�s de 1 586 180 en 2002 � 881 706 en 2012. Le taux par rapport aux inscrits est pass� de 8,8% � 4,1%, soit une baisse de plus de la moiti�. Il est � noter que, bien que cette tendance soit bas�e sur les chiffres officiels, les 16 partis contestataires dont des partis islamistes ne contestent pas le nombre de leurs suffrages exprim�s mais ceux du duo FLN/RND qui aurait �t� surestim� par le bourrage des urnes. Par cons�quent, l�effondrement de l��lectorat islamiste agr�� est une donn�e r�elle. Par contre, quatri�me enseignement, les partis autres que ceux du pouvoir et autres que ceux du courant islamiste (17 partis en 2002 et 22 en 2012) ont doubl� leur mise en valeur absolue entre 2002 et 2012, passant de 2 561 872 voix � 4 904 853 voix, mais n�augmentant cependant que d�un tiers par rapport aux inscrits, soit 14,2% en 2002 et 22,7% en 2012. Ils ont, � coup s�r, b�n�fici� du r�tr�cissement des bases sociales du pouvoir et des partis islamistes. A la lumi�re de ces enseignements, la conclusion qui s�impose est que la rupture des Alg�riens avec les partis les plus influents jusqu�� pr�sent est consomm�e. Le basculement d�une partie des Alg�riens qui ont encore de l�espoir dans les �lections vers les nouveaux partis ou les anciens partis qui n�ont pas exerc� le pouvoir ne peut �tre interpr�t� que comme la recherche d�une porte de sortie autre que celle mise en �uvre par les partis qui ont gouvern�. A ce sujet, il est symptomatique de constater que les 16 partis qui boycottent l�APN sont plus repr�sentatifs que le duo FLN/RND : le total de leurs suffrages exprim�s qui est 2 696 204 avec un nombre de si�ges de 29 seulement est largement sup�rieur au total des suffrages exprim�s des partis du pouvoir qui est de 1 848 420 avec 276 si�ges : une anomalie qu�il faudra bien �lucider. Si le nombre de suffrages exprim�s est r�el, la voix des 16 partis devrait �tre entendue d�une fa�on ou d�une autre en toute logique d�mocratique. C�est ainsi qu�aux �lections de d�cembre 1991, on aurait d� tenir compte de la repr�sentativit� r�elle du FIS et lui faire comprendre que malgr� qu�il ait obtenu la majorit� des si�ges au Parlement � cause du mode de scrutin de l��poque, il n�en demeure pas moins qu�il ne repr�sentait que 24,5% du corps �lectoral (3 260 222 sur un total de 13 258 554 inscrits) et 47,3% des suffrages exprim�s dont le total �tait de 6 383 443. Par cons�quent, il ne faut pas toujours se braquer sur le nombre de si�ges et bomber le torse, il faut �galement tenir compte du nombre de voix obtenues. Si la contradiction entre le nombre de si�ges et le nombre de voix obtenues est intenable, il faut alors penser � changer le mode de scrutin ou � recompter les voix si n�cessaire. La stabilit� du pays vaut tous les sacrifices. A ce sujet, et suite aux constats faits lors des derni�res �lections, il est possible d�apporter deux am�liorations au mode de scrutin actuel qui est meilleur que le mode de scrutin � la majorit� absolue � deux tours pratiqu� lors des �lections de d�cembre 1991, mode qui �limine tout candidat qui n�atteint pas les 50% et meilleur que la proportionnelle int�grale qui, bien que juste, est un mode qui est facteur d�instabilit� gouvernementale en permettant l�accession au Parlement de tout parti totalisant au plan national le nombre de voix requises pour obtenir un si�ge, ce qui aura pour r�sultat d�avoir au Parlement un tr�s grand nombre de partis sans assise populaire et ayant leur mot � dire dans la composition du gouvernement. Au mode pratiqu� actuellement dans notre pays, � savoir la proportionnelle par wilaya, la premi�re am�lioration consiste � organiser un deuxi�me tour pour permettre aux �lecteurs dont les partis ont �t� �limin�s par le seuil des 5% de choisir entre les partis qui ont �t� retenus, au lieu de disposer de leur voix et les attribuer proportionnellement aux partis arriv�s en t�te comme cela se fait actuellement. La deuxi�me am�lioration est de remplacer le seuil �liminatoire de 5% qui est arbitraire par un seuil objectif qui est le nombre de suffrages exprim�s n�cessaires pour obtenir un si�ge de d�put�, nombre qui n�est pas fixe et qui varie d�une wilaya � l�autre, puisqu�il est fonction du nombre total de suffrages exprim�s de la wilaya au premier tour et du nombre de si�ges de la wilaya. Enfin, pour conclure, il y a un crit�re universel qui permet de qualifier si des �lections sont transparentes et honn�tes, et ce n�est s�rement pas la pr�sence des observateurs internationaux : ce crit�re, ce sont les candidats eux-m�mes ou leurs partis qui se sont engag�s dans les �lections et qui les ont perdues, qui reconnaissent les r�sultats et qui vont m�me jusqu�� f�liciter les vainqueurs. Si cette perspective venait � se concr�tiser dans notre pays, nous pourrons alors affirmer sans le moindre doute que le printemps alg�rien s�est effectivement r�alis�.