'est demain que leurs cha�nes seront plus l�g�res. L'espace d'une journ�e, ou d'une demi-journ�e, et pour peu qu'il fasse beau, elles occuperont la rue, oublieront la marmaille et les fourneaux. C'est curieux, comme ce 8 mars, Journ�e internationale de la femme, prend quasiment des allures de f�tes l�gales dans les pays arabes et musulmans. C'est le seul jour o� la puissance m�le est tenue de l�cher des miettes avec quelques boutons de rose. On r�serve aussi cette occasion pour les effets d'annonce. Les m�dias lourds ou ultra l�gers montreront quelques sp�cimens de r�ussite sociale ind�pendante de la volont� masculine. On exhibera quelques rescap�es de la lutte arm�e, les grandes "cocues" de la R�volution, encore en �ge de para�tre. Tout �a pour dire aux g�n�rations actuelles, en un message subliminal : "Voyez ! Elles ont fait la r�volution et elles en sont revenues vivantes. Elles sont retourn�es � l'anonymat et dans l'oubli et elles ont surv�cu." Et elles, pudiques comme au premier jour, viendront dire leur joie d'�tre encore l�. M�me sous la torture, elles n'avoueront pas les trahisons de maris arrivistes et lubriques, les l�chet�s d'avant et les abandons d'apr�s. Bien s�r, la religion sera encore convoqu�e. Des imams instruits ou inspir�s leur r�p�teront l'�ternel message prodigu� aux afflig�es : souvenez-vous du sort des petites filles de la "djahilia". Une seule alternative : faire du sur-place ou revenir en arri�re. Sans vouloir jouer les cassandres, il me para�t utile de temp�rer l'ardeur festive (si ardeur et f�te il y a, bien s�r) de mes concitoyennes avec ces quelques �l�ments puis�s � la r�alit� arabe. Dix ans apr�s la conf�rence de P�kin qui a consacr�, sous l'�gide des Nations unies, le principe de l'�galit� hommes femmes, le rapport 2004 sur le progr�s de la femme arabe en dit plus. Il a �t� �labor� � la lumi�re des r�solutions de P�kin et des engagements post�rieurs des pays arabes � les appliquer. Les auteurs du rapport, �tabli sous l'�gide du Fonds des Nations unies pour le d�veloppement de la femme (Unifem), dressent un tableau peu reluisant. (http://www.unifem.org.jo/). Constatant la faible participation des femmes � la vie �conomique et politique dans les pays arabes, le rapport pointe les obstacles essentiels au progr�s que constituent la tradition et la religion. En d�pit des succ�s remport�s par des initiatives gouvernementales, note-t-il, la femme n'arrive pas � s'imposer dans les institutions qui jouent un r�le fondamental dans la vie des citoyens. Ainsi des facteurs traditionnels contribuent � limiter la participation des femmes � la prise de d�cision tant aux plans national et local que religieux. Au chapitre du r�le des femmes arabes dans la vie politique, le rapport cible plusieurs obstacles dans les pays o� la Constitution consacre en th�orie l'�galit� entre les deux sexes : - Le mauvais usage des voix f�minines. En Alg�rie par exemple, pr�cise le rapport, le mari vote � la place de son �pouse sans qu'elle ait le pouvoir de s'opposer. - Le climat de violence des consultations qui caract�rise les consultations. On utilise ainsi la violence physique (agressions, meurtres) ou morale (menaces) pour emp�cher les candidats de s'exprimer ou les �lecteurs de voter. Des candidats ont re�u des menaces de mort, comme en Jordanie, en Egypte, en Alg�rie ou au Y�men, et certains d'entre eux ont �t� assassin�s. - Le harc�lement des candidates. Celles-ci re�oivent plus de menaces physiques et morales que les candidats. Elles ont aussi beaucoup de difficult�s � obtenir des moyens de financement pour leurs campagnes � cause de l'absence de confiance en leurs capacit�s en tant que femmes et en leurs chances de victoire. De plus, les femmes qui font de la politique sont plus souvent victimes de rumeurs malveillantes, d'accusations diverses et de scandales qui influent n�gativement sur leur image de marque et d�tournent d'elles le lectorat. Le rapport de l'Unifem insiste donc sur le r�le fondamental de la s�curit�. La femme, dit-il, ne peut participer pleinement � l'action politique que si elle a un sentiment de s�curit� physique, morale et psychologique. Elle ne peut le faire aussi si elle n'est pas en mesure de faire face � toutes ses responsabilit�s familiales et professionnelles. Pour r�duire ces obstacles objectifs ou subjectifs, le rapport pr�conise le recours � des politiques r�pondant mieux aux besoins de la femme, � savoir : - La r�forme des modes �lectoraux - Des mesures de discrimination positive en faveur des femmes - Adoption de m�canismes pr�cis pour soutenir les �lites f�minines dirigeantes - Encourager les capacit�s et les talents des �lites f�minines dirigeantes - Renforcer le r�le des m�dias dans l'�laboration d'une image positive de la femme dans son action politique et dans sa participation au pouvoir et � la prise de d�cision. Sans prendre de position sur le fond, le rapport revient �galement sur les nombreuses r�serves �mises par les pays arabes concernant l'accord de P�kin. Il publie en annexe la liste des pays et leurs arguments. Ainsi en est-il de l'article 02 par lequel les nations pr�sentes � P�kin s'engageaient � �liminer toute forme de discrimination � l'�gard des femmes. Il me para�t utile de rappeler que l'Alg�rie �tait au nombre des pays ayant adopt� l'article 02 � condition que celui-ci ne soit pas en contradiction avec le code de la famille. L'�gypte et le Maroc avaient �t� plus nets : oui � l'article 02 tant qu'il n'est pas en porte-�-faux avec la Chariaa. Depuis, le Maroc a fait du chemin sur le plan l�gislatif quoique les pesanteurs sociales soient aussi pr�sentes qu'en Alg�rie. Quant au Kowe�t, particuli�rement d�sign� � cause de son refus d'octroyer des droits fondamentaux aux femmes, il donne des signes d'ouverture avec la menace terroriste. C'est d'ailleurs aujourd'hui, � la veille du 8 mars, que le Parlement kowe�tien doit examiner un projet de loi sur la femme. L'instance l�gislative avait d�j� refus� l'ann�e derni�re d'ent�riner de nouveaux droits politiques, celui d'�tre �ligibles en particulier, pour les femmes du Kowe�t. Cette foisci, le gouvernement revient � la charge tout en faisant planer la menace d'un arbitrage de l'�mir en cas de nouveau rejet. Il y a aussi un �l�ment nouveau qui est le soutien du parti islamiste de l'Ouma. Ce dernier qui vient de se constituer compte de nombreux dirigeants connus pour leur hostilit� � toute �volution du statut de la femme. Alors? Notre consœur kowe�tienne Iqbal Al-Ahmed estime qu'il s'agit d'une simple position tactique pour s�duire les lib�raux alors que tous les autres courants islamistes ont vot� contre le projet. Les femmes y�m�nites ont, elles, pris les devants pour combattre les adversaires du principe de quotas r�serv�s aux femmes dans les assembl�es �lues. A en croire le quotidien Al-Quds, des f�ministes non encore identifi�es ont appel� les femmes � boycotter les partis et les associations qui sont hostiles � cette initiative. Plus radical encore, le libyen Mohamed Al-Houni, consid�r� comme un des nouveaux lib�raux arabes, compare la soci�t� arabe � un troupeau dirig� par un m�le orgueilleux. Il demande aux femmes de se r�volter en refusant de faire des enfants. "J'appelle les femmes arabes � faire la gr�ve de la procr�ation. Car, dit-il, leurs enfants n'apprendront que l'art de la mort chez les th�ologiens du n�ant. Ils n'auront le choix qu'entre tuer ou mourir, au service du divin m�le de la meute". A vous de jouer, Mesdames !