Développements dangereux que ceux intervenus en Syrie, avec l'implication directe des Etats-Unis dont les forces ont bombardé, hier, à l'aube, une base de l'aviation syrienne. M. Kebci - Alger (Le Soir) - Des frappes intervenues vers 00h40GMT ayant vu l'armée américaine lancer pas moins de 59 missiles Tomahawk tirés par ses navires USS Porter et USS Ross, postés en Méditerranée orientale sur la base de Al-Chaayrate, dans la province centrale de Homs. Elles viennent en réaction à une attaque chimique présumée dans la localité de Khan Cheikhoun, que Washington impute au gouvernement syrien mais que celui-ci dément catégoriquement. Ces attaques auraient fait six morts, des blessés et d'importants dégâts matériels, selon l'armée syrienne qui qualifie ces attaques d'«agression américaine condamnable qui souligne la poursuite de la stratégie erronée des Etats-Unis», promettant que sa riposte sera «davantage de détermination à poursuivre son devoir national dans la défense du peuple syrien et à écraser le terrorisme où qu'il soit». La réaction musclée de Moscou Et ces frappes US ont fait réagir aussitôt la Russie qui a annoncé plusieurs décisions. D'abord la suspension de l'accord avec Washington sur la prévention d'incidents aériens en Syrie et la sécurité des vols lors des opérations en Syrie, signé en octobre 2015 quelques semaines après le début de l'intervention russe dans ce pays. Moscou qui, pour rappel, mène des frappes aériennes depuis la fin septembre 2015 en Syrie, où elle a déployé avions et hélicoptères, réclame également une réunion d'urgence du Conseil de sécurité de l'ONU, a aussi décidé d'une série de mesures au plus vite pour «protéger les infrastructures syriennes les plus sensibles, renforcer et améliorer l'efficacité du système de défense antiaérienne des forces armées syriennes». Le Président russe qualifie ces attaques US d'«agression contre un Etat souverain», et causent un «préjudice considérable» aux relations entre Moscou et Washington «déjà dans un état lamentable». Pour Vladimir Poutine, qui devait tenir une réunion avec les membres permanents du Conseil de sécurité de son pays, hier, ces frappes US «ne nous rapprochent pas de l'objectif final de la lutte contre le terrorisme international mais dressent au contraire de sérieux obstacles pour la constitution d'une coalition internationale pour la lutte contre le terrorisme», estimant que «l'armée syrienne ne dispose pas de réserves d'armes chimiques dont la destruction avait déjà été constatée par l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques». La Russie, dont le ministère de la Défense soutient que les frappes américaines contre la base de Shayrat avaient été «planifiées depuis longtemps», l'attaque chimique de Khan Cheikhoun n'étant qu'un prétexte, soutient qu'«ignorer complètement les faits concernant l'usage par les terroristes d'armes chimiques aggrave considérablement la situation». Pour sa part, Téhéran, allié du régime syrien, a «vigoureusement» condamné les frappes américaines». Pour le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères de l'Iran, cette attaque ne fera qu'«aider les groupes terroristes qui sont en déclin et compliquer encore la situation en Syrie et dans la région». Satisfaction chez les alliés US Du côté des alliés US, c'est la satisfaction et l'applaudissement à ces frappes et semblent répondre à l'appel du Président Donald Trump qui a exhorté «toutes les nations civilisées» à rejoindre son pays pour «mettre un terme au bain de sang en Syrie». C'est ainsi que le couple franco-allemand fait porter au Président syrien «l'entière responsabilité» pour «son recours aux armes chimiques qui ne pouvait rester impuni». «Assad porte l'entière responsabilité de ce développement. Son recours continu aux armes chimiques et aux crimes de masse ne peut en effet rester impuni», ont indiqué Angela Merkel et François Hollande dans un communiqué commun, assurant que leurs deux pays «poursuivront donc leurs efforts avec leurs partenaires dans le cadre des Nations-Unies pour sanctionner» l'usage d'armes chimiques par le gouvernement syrien. Alors que Londres a estimé que ces frappes sont «une réponse appropriée à l'attaque barbare à l'arme chimique perpétrée par le régime syrien», selon un porte-parole de Downing Street, la Turquie s'est aussi félicitée de ces frappes américaines, qu'elle a jugées «positives». Son vice-Premier ministre Numan Kurtulmus a, en effet, considéré que «le régime de Bachar Al-Assad doit être puni entièrement sur le plan international». Ceci au moment où l'Arabie Saoudite a qualifié de «courageuse» la décision du président US quant à ces frappes contre une base aérienne syrienne, qu'elle assure «soutenir pleinement» alors que Israël a salué ce qu'il qualifie de «message de détermination» qu'il espère être «entendu également «à Téhéran, Pyongyang et ailleurs». Autres soutiens traditionnels des US, le Japon qui dit soutenir la «détermination» des Etats-Unis, dont l'action, selon son Premier ministre Shinzo Abe, avait «eu pour but d'éviter une aggravation de la situation», l'Italie dont le chef du gouvernement Paolo Gentiloni a estimé que les frappes américaines étaient «une réponse motivée à un crime de guerre» et qu'elles devraient «accélérer la recherche d'une solution négociée durable» ou encore Madrid qui dit voir dans les frappes américaines «une réponse mesurée et proportionnée à l'usage d'armes chimiques» et appelle à «une mise en œuvre dès que possible d'un processus politique de transition» en Syrie, ou le Portugal dont le ministre des Affaires étrangères, Augusto Santos Silva, dit «comprendre» les frappes américaines et souhaiter «une position et une réaction communes de la part de l'Europe». Pékin appelle au calme Seul pays à se tenir, comme de coutume, à équidistance, la Chine, se limitant à appeler au calme et à «éviter toute nouvelle détérioration de la situation en Syrie». «Nous sommes profondément choqués» par l'attaque visant Khan Cheikhoun, que nous condamnons fermement (...) Nous nous opposons à l'usage d'armes chimiques par n'importe quel pays ou organisation, quels que soient les circonstances et l'objectif», a affirmé en réaction Mme Hua Chunying, porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères. Pékin plaide, par ailleurs, pour «une enquête indépendante et complète», réclamant des «preuves irréfutables», a relevé Mme Hua.