Une frappe contre le régime syrien, accusé d'avoir utilisé des armes chimiques dans sa guerre contre les rebelles, semblait imminente hier, Washington et ses alliés préparant le terrain pour une action militaire contre laquelle Damas a promis de se défendre. «Nous avons positionné des éléments pour être capables de répondre à toute option choisie par le président» Barack Obama, a déclaré le secrétaire américain à la Défense Chuck Hagel à la BBC. «Nous sommes prêts à y aller», a-t-il assuré affirmant que les Etats-Unis allaient bientôt présenter des preuves de l'usage par le régime syrien de Bachar al-Assad d'armes chimiques. Selon la presse américaine, M. Obama réfléchirait à une frappe limitée, qui ne durerait probablement pas plus de deux jours selon le Washington Post, le New York Times parlant également d'une possible opération limitée, avec des tirs de missiles de croisière depuis des bâtiments américains en Méditerranée, sans chercher à renverser le président Assad. Londres a indiqué que l'armée britannique se préparait à l'éventualité d'une action militaire, assurant que la Grande-Bretagne «n'essaie pas de renverser» le régime syrien. Le Premier ministre britannique David Cameron a convoqué le Parlement pour un vote jeudi sur «la réponse du Royaume-Uni aux attaques à l'arme chimique» présumées qui auraient été menées le 21 août près de Damas. L'opposition syrienne a parlé d'une intervention «imminente» contre le régime. «C'est une question de jours», a affirmé Ahmad Ramadan, membre du comité politique de la Coalition de l'opposition basé en Turquie. Il a fait état de «rencontres entre la Coalition, l'Armée syrienne libre et les pays alliés durant lesquelles sont discutées les cibles éventuelles", dont des aéroports, des bases militaires et des dépôts d'armes. Le régime a lui martelé que son pays se défendrait en cas de frappe. «Des moyens de défense qui vont surprendre» «Nous avons deux options: soit nous rendre, soit nous défendre (...) Le seconde alternative est la meilleure», a affirmé lors d'une conférence de presse le ministre syrien des Affaires étrangères Walid Mouallem. «Nous avons des moyens de défense qui vont surprendre». Selon lui, une intervention militaire «servira les intérêts d'Israël et en deuxième lieu du Front al-Nosra», groupe armé jihadiste combattant avec les rebelles et qui a prêté allégeance à Al-Qaïda. Il a en outre mis ceux qui veulent frapper la Syrie «au défi de montrer ce qu'ils ont comme preuves» concernant un éventuel usage d'armes chimiques par le régime. Principal allié de la Syrie, Moscou a de nouveau appelé la communauté internationale à la «prudence». «Les tentatives visant à contourner le Conseil de sécurité, créer une fois de plus des prétextes artificiels et infondés pour une intervention militaire dans la région (...) auront des conséquences catastrophiques pour les autres pays du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord», a averti le ministère russe des Affaires étrangères. Autre allié de Damas, l'Iran a prévenu des «lourdes conséquences» qu'aurait une intervention militaire étrangère. L'Arabie saoudite, appui de poids des rebelles, a en revanche appelé à une action «ferme et sérieuse» contre le régime, alors que la Ligue arabe a accusé Damas d'avoir mené l'attaque présumée à l'arme chimique. Le président François Hollande a affirmé que la France était «prête à punir ceux qui ont pris la décision infâme de gazer des innocents» en Syrie, où la «guerre civile (...) menace aujourd'hui la paix du monde». Israël a pour sa part promis une riposte «violente»si Damas attaquait le territoire israélien. Les habitants de Damas vivent dans la peur Alors que de hauts responsables militaires de pays occidentaux et de la région étaient réunis à Amman pour des discussions au sujet «des scénarios» possibles sur la Syrie, un haut responsable jordanien a affirmé que son pays ne serait pas une «rampe de lancement» pour une intervention militaire. L'opposition et plusieurs pays accusent le régime d'avoir fait usage de gaz toxiques tuant des centaines de personnes le 21 août à Moadamiyat al-Cham et dans la Ghouta orientale, deux régions contrôlées par les rebelles à l'ouest et à l'est de Damas. Les experts de l'ONU chargés d'enquêter sur ces attaques devaient reprendre leur travail hier, mais leur mission a été reportée à aujourd'huii faute, selon M. Mouallem, de garanties de la part des rebelles concernant leur sécurité. Mais les insurgés ont démenti ces accusations. Malgré des tirs sur leur convoi, les experts s'étaient rendus lundi à Mouadamiyat al-Cham, où ils ont effectué, selon l'ONU, une collecte «productive» de preuves. A Damas, entre-temps, les déclarations sur une intervention militaire imminente ont semé la peur parmi la population. «Ils vont frapper Mazzé, j'en suis sûre, c'est une cible sensible», affirme Jihane, une femme résidant près de l'aéroport militaire de Mazzé, le plus important de Syrie. «J'ai envoyé ma femme au marché et elle a acheté en grande quantité de la viande, des tomates, du pain et des pâtes», confie Malek, un vendeur. Face à la crainte d'une escalade, Wall Street a ouvert en net repli hier : le Dow Jones perdait 0,43% et le Nasdaq 0,81%. Les Bourses du Golfe étaient aussi en forte baisse, l'indice de Dubaï perdant plus de 7 et celui d'Arabie saoudite plus de 4%. Les cours du pétrole étaient de leur côté en nette hausse à New York, une éventuelle intervention en Syrie pouvant déstabiliser l'ensemble de la région, importante zone de production d'or noir. /p