Dans un entretien accordé au quotidien français Le Monde, le Premier ministre Ahmed Ouyahia a tenu à exprimer la position et l'inquiétude de l'Algérie à l'égard de la crise malienne. M. Ouyahia a insisté sur le dialogue comme solution à ce conflit et que l'Algérie n'acceptera jamais une remise en cause de l'intégrité territoriale du Mali. Le Premier ministre a annoncé, également, la tenue prochainement d'une réunion du Centre d'état-major commun antiterroriste (Cemoc) à Nouakchott en Mauritanie. Connaissant bien le problème du Mali et des Touaregs, pour avoir été un médiateur de ce dossier par le passé, Ahmed Ouyahia a estimé que «la situation est très, très préoccupante» au Mali. Il s'agit, selon lui, d'un «foyer de tension important, à nos frontières, et qui a plusieurs dimensions», ajoutant «qu'il y a d'abord un problème entre les gens du Nord, les Touaregs et l'autorité centrale au Mali, lié au sous-développement et à la faiblesse d'un Etat à prendre en charge toute la problématique de son territoire». L'Algérie plaide pour une solution dans le cadre d'un dialogue entre les différentes parties. «Nous sommes pour une solution qui passe par le dialogue. L'Algérie n'acceptera jamais une remise en cause de l'intégrité territoriale du Mali», a souligné M. Ouyahia, signalant la menace islamiste qui a «déclaré avoir pris les armes pour instaurer la charia et un Etat islamique au Mali – le fondement même de ce que l'Algérie a eu à subir et à combattre pendant plus d'une décennie et que nous appelons la tragédie nationale». La déstabilisation du Mali est une des conséquences de la guerre en Libye, a tenu à préciser le Premier ministre, en déclarant en ces termes : «Nous avions averti des conséquences potentiellement tragiques de tout ce qui partait comme armement de la Libye voisine, hors de tout contrôle. Ce que nous vivons à présent au Mali en est, malheureusement, la parfaite illustration.» Quel niveau de menace cela représente-t-il pour l'Algérie ? Pour cette question, Ahmed Ouyahia a évoqué «un gros souci», sans oublier de citer le terrorisme. «Le MNLA, mouvement porteur des revendications cycliques des populations touareg du Nord, s'est fait chasser des villes qu'il occupait par les forces terroristes du groupe Ansar Dine. Nous avons toujours été partisans d'une solidarité internationale contre le terrorisme, dont nous disons, depuis 1994, qu'il ne connaît ni frontières ni nationalité». S'agissant de la lutte contre le terrorisme, le Premier ministre rappelle la stratégie et la doctrine de l'Algérie, à savoir l'assèchement du soutien au sein de la population, la lutte implacable de l'Etat, la vigilance permanente et le non-paiement des rançons pour la libération des otages. Tout en réitérant l'appel de l'Algérie au rétablissement de l'ordre constitutionnel au Mali, M. Ouyahia a annoncé une réunion dans les prochains jours à Nouakchott (Mauritanie) du Centre d'état-major commun antiterroriste (Cemoc), dont «la présence des militaires maliens dans ce cadre est impérative», dit-il. Interrogé sur le rôle des pays occidentaux quant à la résolution de ce conflit, le chef du gouvernement a eu cette réponse critique à l'égard de l'intervention étrangère : «Chaque fois qu'un acteur étranger joue un rôle essentiel, c'est un dérapage programmé, immédiat ou six mois plus tard. Les exemples sont nombreux. Mais il faut aider le Mali à faire face à ses problèmes de développement et à renforcer son armée.» Autres moyens d'aide cités par M. Ouyahia, la «rigueur dans la lutte contre le terrorisme» en mettant en particulier «un terme au paiement des rançons pour les otages» et «l'intensification de la coopération internationale et sous-régionale du Cemoc pour maîtriser le terrorisme dans cet espace terriblement vaste, terriblement vide, qu'est le Sahel».