Que se passe-t-il au complexe sidérurgique d'El Hadjar ? Quels sont les enjeux ? Qui sont les parties prenantes dans le conflit actuel ? Des questions auxquelles les 7000 travailleurs attendent des réponses dépassionnées, et surtout désintéressées, ne reposant sur les intérêts d'aucune des parties alimentant le bras de fer. A peine soulagés suite à l'accord donné par le Premier ministère pour le renouvellement du contrat de partenariat avec ArcelorMittal (fusion entre l'indien Mittal Steel et l'européen Arcelor), les travailleurs du complexe sidérurgique se voient entraînés (malgré eux) dans un conflit pas du tout prioritaire, surtout par rapport à l'obligation de résultat auquel est tenu ArcelorMittal en Algérie. La «filiale» du numéro deux mondial de l'acier qui a fini, en 2012, par accepter toutes les garanties financières exigées par la Banque extérieure d'Algérie (BEA) pour l'obtention d'un crédit de 14 milliards DA se devait, théoriquement, de se doter d'une capacité de production de 2 millions de tonnes d'acier par an. L'objectif est-il atteint ? La production est-elle supérieure à avant 2001, année durant laquelle le plus grand complexe sidérurgique du Maghreb est passé du public au privé ? Le partage des parts (70% du complexe détenus par le groupe indien et 30% par l'Etat) satisfait-il les travailleurs ? Ce sont d'autres questions non entendues, peut-être à cause du bruit fait par ces bagarres qui opposent, depuis quelques jours, des partisans de Aissa Menadi, député sortant et ex-secrétaire général du syndicat d'entreprise, et Smain Kouadria, élu député au terme des élections législatives du 10 mai de l'année en cours et secrétaire général sortant de la même entreprise. Un conflit qui a fait fuir des responsables étrangers d'ArcelorMittal Annaba, dont le nouveau directeur général Joe Kazadi, successeur de Vincent Le Gouic à la tête de l'entreprise, et qui a contraint les autorités locales à intervenir pour rétablir la sécurité au bénéfice du complexe et éviter que l'affrontement (qui remet au second plan les vrais préoccupations et défis, révélés ou non, ayant motivé le passage du complexe du public au privé) ne prenne une ampleur plus grave. Le conflit qui visiblement tourne autour de l'organisation, en septembre 2012, d'élections pour l'instauration d'un nouveau syndicat, a provoqué un malaise, reconnu d'ailleurs par le responsable de la communication d'ArcelorMittal Annaba qui a déclaré à l'APS que «le climat social qui prévaut actuellement dans cette usine risque de dégénérer, même si la production sidérurgique n'a pas été perturbée jusqu'à présent par ce malaise». Le maintien du niveau de production illustre la détermination des travailleurs à préserver leur outil de travail. Quel est donc le nombre de travailleurs engagés dans le conflit ? Les pro-Aissa Menadi seraient «quelques milliers», selon quelques journaux et «une soixantaine» selon d'autres. C'est dire qu'une certaine opacité entoure le dossier. Pour rappel, le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, qui avait rassuré, en janvier de l'année en cours, les travailleurs, en leur lançant que «l'Etat ne les a pas abandonnés» et que «l'Etat algérien ne va pas assister à la disparition d'El Hadjar», avait fustigé le groupe indien au cours d'une conférence de presse. «Lorsque le groupe indien était en bonne santé financière, il recourait aux banques étrangères, et maintenant qu'il est en difficulté, il courtise nos banques», avait notamment déclaré Ahmed Ouyahia alors que ArcelorMittal Annaba et la BEA n'étaient pas parvenus à un accord à l'époque. Le Premier ministre, qui avait accusé le groupe indien de ne pas avoir tenu ses engagements, avait ajouté à l'attention des travailleurs : «Ne soyez pas une arme entre les mains des étrangers que nous employons». Depuis, Vincent Le Gouic avait été remplacé par Joe Kazadi à la tête d'Arcelor Mittal Annaba.