Annoncé par le calendrier ou par les hirondelles, le printemps est là. Le soleil est toujours gratuit mais on ne sait plus s'il est pour tout le monde. Les enfants sont tous en congé mais ils ne vont pas tous partir en vacances. Le Salon de l'auto est ouvert pour tout le monde. Il y en a qui y iront avec des brouettes d'argent, même si cette fois-ci, une grande «nouveauté» leur impose le chèque certifié. D'autres iront traquer les petites «remises» et d'autres encore vont faire du lèche… vitres avant de vérifier leurs fonds de poche pour voir s'ils en ont suffisamment pour le sandwich. Le printemps est beau mais il est plus beau que la vie. Un peu trop beau. Les enfants se font enlever et tuer pour que les islamistes demandent l'application de la peine de mort. Il paraît que c'est une «revendication populaire». On s'invente le printemps qu'on veut dans l'horrible douleur des autres. Le soleil est gratuit, la bêtise aussi. On promet du boulot sans parler de l'entreprise où les demandeurs de boulot vont bouloter. L'Etat fait tout au printemps. Une saison aussi verte que les numéros verts. On ne savait pas que c'était aussi simple de mettre les enfants à l'abri des enlèvements et de l'assassinat. On le découvre sous un soleil radieux. Les petits «Verts» se font malmener par les petits Béninois et humilier par les petits Egyptiens à Aïn Témouchent pendant que du côté de Boufarik, on a oublié qu'un tour cycliste se courait sur un itinéraire fermé à la circulation. Un ado se fait écrouer sous le beau soleil d'Agadir pour agression sexuelle et Farouk Ksentini fait ce qu'il peut pour politiser l'affaire. La justice marocaine est-elle indépendante ? Elle l'est au moins aussi bien – à moins que ce ne soit aussi peu – que la nôtre. Deux pays qui ont la même justice devraient s'entendre, mais ce n'est apparemment pas le cas, puisque l'ado Islam Khoualed va vraisemblablement passer le printemps à l'abri du soleil et loin de sa planche à voile. Sous le soleil de Bouzaréah, un jeune homme de 35 ans se fait mortellement poignarder. Le soir au JT de 20h, l'ENTV nous apprend que Tarek Goulmamine, monteur de métier et père de trois enfants en bas âge est «décédé». On ne fait pas dans le détail à l'orée du printemps. Peut-on «décéder» de plusieurs coups de couteau ? Le Syndicat des journalistes rend publique une déclaration dans laquelle il précise que Tarek Goulmamine a été assassiné par un repenti. Il y aurait eu un démenti de la police et de l'«entourage», alors que la famille de la victime persiste et signe. Repenti ou pas repenti ? La vérité fait-elle si peur sous le soleil ? On ne sait pas si c'est le printemps dans le Texas mais on sait que Chakib Khelil n'a pas besoin de soleil, sinon il serait resté en Algérie. Remarquez que même quand il était là, il ne donnait pas l'impression d'être un amoureux du bronzage bucolique, puisqu'il ne quittait Djenane El Mithak que pour la tour du Val d'Hydra ou l'aéroport. Enfin, il a été une fois à Oran pour la conférence du «LNG 16» dont les fournisseurs sont en train de réclamer 80 millions de dinars aux «organisateurs». Un sandwich, comparé à ce qu'on a touché chez Saipem et SNC Lavalin. Mais au printemps, on se souvient de tout. Y compris que le soleil n'est pas vraiment pour tout le monde.