Apparemment, les clubs de réflexion occidentaux n'aiment prêcher qu'en eaux troubles. Afrique Asie a réalisé un scoop inquiétant. Pour ce magazine, l'Algérie a réalisé des réserves de change de 176,63 milliards de dollars. C'est inquiétant parce que la publication ne révèle pas ses sources alors que dans ce genre de situation, c'est le premier pas vers une rigueur professionnelle. Généralement, c'est la Banque d'Algérie qui communique sur le sujet ou encore le gouvernement à l'occasion de la présentation des projets de loi de finances ou de son bilan annuel. La revue se contente de se référer aux «dernières données publiées mercredi 27 juillet par des organismes financiers internationaux». Dans une contribution adressée à l'Expression, le professeur Abderrahmane Mebtoul rappelle que la Banque d'Algérie, en date du 21 juillet 2011, annonçait des réserves de 160 milliards de dollars. La seconde inquiétude tient au choix du contexte dans lequel cette information est balancée. Le front social était à la revendication depuis des mois en Algérie. Il n'y a que la trêve du Ramadhan pour atténuer cette tendance. Veut-on signifier par là que le rythme de la contestation doit au contraire s'accentuer? Est-ce une manière de pousser les gens à sortir dans la rue? Ce genre d'appels est aussi courant dans la presse nationale. Des titres ne laissent aucun doute sur les intentions de leurs auteurs puisque tout le monde devrait réclamer sa part de gâteau. Mais est-ce que la thérapie de choc est susceptible de générer des acquis plus avantageux que ceux obtenus par la méthode douce? De nombreuses parties, y compris l'Ugta, sont adeptes de cette dernière procédure. La réunion de cette semaine, qui a regroupé le secrétaire général de l'Ugta, Abdelmadjid Sidi Saïd, avec les différentes fédérations, visait justement à préparer les dossiers soumis à la prochaine tripartite de l'automne. Parmi les revendication à mettre sur la table figurent celles des salaires et du pouvoir d'achat. La logique la plus probable est que le gouvernement accède, au moins en partie à ces demandes sociales. Les finances du pays sont effectivement en train de s'améliorer comme l'ont indiqué les chiffres de Sonatrach qui a engrangé des bénéfices de 9,5 milliards de dollars en 2010. Des débats font rage sur la meilleure manière d'utiliser la manne financière de l'Algérie. Faut-il investir, effectuer des dépenses sociales ou alimenter le Fonds de régulation des recettes pour sécuriser l'avenir des générations futures? A la lecture des chiffres de l'économie de l'Algérie, ce sont les trois objectifs qui sont poursuivis, même si quelquefois, l'absence de cohérence est signalée par les analystes en public et pas les officiels en off. Pour l'investissement, ce sont 286 milliards de dollars qui seront dépensés en cinq ans. 10 milliards de dollars sont destinés aux transferts sociaux (aide au logement, soutien des produits alimentaires). Le Fonds de régulation des recettes est évalué à 4842,8 milliards de dinars à fin 2010. Mais est-ce pour autant que le pays est à l'abri de crise dans un monde en ébullition.? La thèse d'un pays insulaire isolé est rejetée y compris par les gouvernants. Ces derniers, tout comme les analystes, ne veulent pas que la nation retombe dans un cycle de violence politique et de perturbation économique. Abderrahmane Mebtoul pense que face à cette situation de turbulences de l'économie mondiale, l'Algérie doit se doter d'un observatoire de prospective pour être à l'écoute des convulsions du marché international, notamment lorsqu'on sait que ses exportations d'hydrocarbures sont libellées en devises. Le pays importe environ 70% des besoins des entreprises et des ménages. C'est pour cela qu'il doit être attentif aux fluctuations des prix des matières premières qui connaissent une flambée au niveau international comme en témoignent les importations importantes de produits alimentaires. Selon Mebtoul, les subventions permettent de comprimer pour l'instant le taux d'inflation qui a des répercussions sur le pouvoir d'achat des Algériens, il met en garde contre le gaspillage et les trafics aux frontières. Il termine sa contribution en disant que l'Algérie saura réaliser une transition démocratique pacifique et le passage d'une économie de rente à une économie hors hydrocarbures pouvant devenir un vecteur actif et dynamisant au niveau du Bassin méditerranéen et arabo-africain. Le tout grâce à un dialogue soutenu et des réformes maîtrisées ainsi qu'une bonne gouvernance et la valorisation du savoir.