«Un ambassadeur est un honnête homme que l'on envoie mentir à l'étranger pour le bien de son pays.» Henry Wotton «Mieux vaut être le premier dans son village que le second dans Rome», cet adage prend tout son sens quand il s'agit de parler du film Wahrani de Lyes Salem. Il a fallu qu'il décroche un prix à Angoulême (Celui de l'interprétation masculine) pour que l'Aarc, l'un des co-producteurs algériens, daigne faire bouger les choses pour une projection du film à Alger. Depuis des mois, c'est la guerre froide entre la production locale du film Wahrani et le producteur gouvernemental algérien pour une question de propriété cinématographique de l'oeuvre et une éventuelle projection à Alger. Cette avant-première est importante et sélective pour le réalisateur s'il venait à postuler pour une place compétitive aux Oscars 2015. Le 24 août, l'APS, l'agence gouvernementale, qui généralement donne l'information de la participation des films algériens à partir des communiqués des productions, avait diffusé l'information de la participation de deux longs métrages de fiction Le Crépuscule des ombres de Mohamed Lakhdar Hamina et L'Oranais de Lyes Salem projetés en avant-première à la 7e édition du Festival du film francophone d'Angoulême en France. L'Aarc qui a l'habitude de communiquer sur la sélection des films qu'elle produit, avait volontairement tué cette information. Mieux encore, le 25 août, l'Aarc pond un communiqué, mais à la surprise générale, ce n'est pas pour parler de la participation de Lyes Salem et Lakhdar Hamina à Angoulême, mais pour évoquer la participation de l'Aarc dans un little festival tunisien, les 10es éditions des Rencontres cinématographiques de Hergla. Le communiqué évoque la programmation Go fourth de Soufiane Adel et Iminig de Embarek Menad. Cette omission dénote une volonté de faire taire l'information sur le succès de cette participation de deux films inscrits dans le cadre du 50e anniversaire de l'Indépendance. Une mise à l'écart qui avait été très mal perçue par les deux réalisateurs, qui ont été les seuls à monter au créneau en s'opposant à la mainmise de la production sur leurs oeuvres par l'Aarc. Le 26 août, le quotidien Liberté publie une information sur sa page radar: «Pas de visa d'exploitation pour L'Oranais de Lyès Salem». Au quotidien Liberté, seule la chef de rubrique culturelle qui est critique de cinéma, connaît le mot technique de «Visa d'exploitation». Qui a livré cette information? En tout cas, cette information n'était pas totalement fausse, puisque le visa était sur le point d'être délivré au réalisateur. Le producteur Yacine Laloui s'est étonné de la publication de cette information et même de la source de l'information. Aucune personne dans l'entourage de Lyes Salem n'avait intérêt à publier ce genre d'information. Cette information touche à la fois Lyes Salem, sa production, le ministère de la Culture et surtout l'Aarc. L'informateur de Liberté est une personne qui connaît bien les rouages de la production. Il a mis dans la gêne tout le monde. Seulement voilà, cette information est tombée au même moment où Lyes Salem décroche le soir du 26 août le Prix du meilleur interprète. Du coup, l'Aarc a dû tempérer ses ardeurs surtout depuis les mises en garde de la ministre de la Culture et le changement de la direction. Un communiqué annonçant la victoire de Lyes Salem à Angoulême le 27 août est alors diffusé, saluant la victoire de la nouvelle génération des cinéastes algériens, mettant fin à 10 jours de suspense. [email protected]