Une belle randonnée à trois escales a été conjointement conduite dimanche soir à Alger, à la veille de la clôture du 9e Festival international de musique andalouse et des musiques anciennes Festivalgérie, par les ensembles Tarab d'Iran, Mezdj de Marseille et Bezmara de Turquie dans des sonorités et mélodies exotiques, au plaisir d'un public nombreux et recueilli. Près de trois heures de temps ont permis aux trois formations qui se sont succédé sur la scène de la salle Ibn Zeydoun de l'Office Riadh El Feth (Oref), d'étaler des répertoires de chants et musiques traditionnels de différents terroirs culturels, invitant l'assistance à la découverte historique dans un voyage onirique dans le temps. Dirigé par Hassen Tabar au santour (espèce de qanun à deux baguettes). L'ensemble Tarab, présent en Algérie en 2011 et 2013, vise à transmettre la musique classique iranienne dans son authenticité à travers le taziyeh (genre artistique alliant la musique au théâtre) et le redif vocal notamment, interprété par Behrokh Shoovarzi, seule femme de la troupe persane. Dans des modes orientaux (maqqamet) empreints de mélancolie, différents sujets sont évoqués, rappelant la vie des temps anciens dans des musiques et rythmes traditionnels exécutés également par Pierre Rigopoulos, au zarb (grande percussion à une seule peau), Shahram Etmâdi au târ (guitare avec une caisse à double corps), Arman Sigarchi au barbat (ancien luth). Les dix musiciens (cinq femmes et autant d'hommes), de l'ensemble Mezdj, dirigés par Mouloud Adel, intervenant en seconde partie de la soirée, ont embarqué l'assistance dans une belle croisière aux couleurs de la Méditerranée, à travers un programme fait de chansons algériennes, tunisiennes, marocaine, occitanes et corses. Précédées d'un instrumental dans lequel des airs espagnols se sont mêlés à des mélodies du malouf, les pièces, Ya laïmi aa la zine manosborchi (Tunisie), Harramtou bik nouâassi (Algérie), Aarous yawm el qiyama (Maroc), Diu Vi (Corse) et Bellisanto (Occitanie), ont constitué la prestation de l'ensemble marseillais. Dans un contenu dense et une forme esthétique marquée par une distribution judicieuse d'instruments, alliant ceux des genres traditionnel et contemporain, Mezdj entend livrer, depuis 2008, année de sa création, «un message de partage, de fraternité et de paix», a précisé Mouloud Adel. Bezmara de Turquie, fondé en 1996 par Fikrat Karakayat, devant clore cette soirée muséale est remonté dans le temps pour reconstituer un univers culturel et artistique datant du XVIe et XVIIe siècles, avec des pièces très anciennes rendues par sept musiciens, dont une femme et un chanteur libre. Des instruments à cordes, dont l'existence remonte au Moyen Age ont créé des atmosphères de l'époque de l'Empire Ottoman, avec des sonorités aiguës laissant s'échapper des taqqassims renvoyant aux musiques de cour royale. Les pièces interprétées étaient toutes de courte durée, et exécutées dans un mode d'orchestration à l'unisson, avec des instruments comme le kopuz (basse), le barbat (ancien luth), le sheng (sorte de violon), rebab (ancien violon), et sahrud (luth de grande taille). Les trois prestations ont été appréciées et très applaudies par un public qui s'est délecté, savourant chaque instant de la soirée dans l'allégresse et la volupté. Le 9e Festivalgérie ouvert le 20 décembre dernier, a pris fin, avec une cérémonie de clôture qui sera animée par l'ensemble algérien de musique andalouse (Enama).