Rassemblement et unité nationale. Les Français l'ont exprimé en masse, hier, dans de grandioses manifestations à travers leur pays. Sur ce plan, la journée a été historique pour la France. La solidarité internationale était elle aussi exceptionnelle. Pas moins de 50 chefs d'Etat ou leurs représentants ont fait le voyage. Ils sont venus de tous les continents. D'Europe, d'Afrique, d'Amérique, des pays arabes, il y avait aussi les deux principaux chefs d'Etat du Moyen-Orient, Mahmoud Abbas et Netanyahu. L'Algérie était représentée par Ramtane Lamamra, ministre des Affaires étrangères. En maître de céans, le président Hollande les a tous accueillis sur le perron de l'Elysée avant de marcher à leurs côtés, dans la rue, à Paris. L'ambiance qui se dégageait de ce grand élan d'unité et de solidarité ressemblait fort à un recueillement. A de grandes funérailles. En tout cas, un sentiment de grande tristesse pour l'épreuve que venait de traverser, la veille, la France. Au-delà de tous ces signes de sympathie et de compassion et dès le lendemain, la France se retrouvera face au risque terroriste que le rassemblement d'hier, aussi historique qu'il puisse être, ne peut avoir réglé. Une fois les délégations étrangères rentrées chez elles, la politique reprendra ses droits et les intérêts divergents réapparaîtront même dans les pays qui ont participé à la marche parisienne. La seule proposition concrète a été formulée par les Etats-Unis qui, par la voix du ministre américain de la Justice, Eric Holder, ont proposé une conférence internationale contre le terrorisme, le 18 février prochain à Washington. D'ici là, la France doit régler des problèmes de fonds sur cette question du terrorisme si elle veut réellement contenir ses assauts. La priorité des priorités est de réaliser une véritable réconciliation nationale française. L'unité nationale exprimée hier était incomplète avec l'exclusion du Front national et ses millions d'électrices et électeurs français qui n'étaient pas présents à la marche de Paris et qui ont dû défiler en province. Pas un mot non plus à l'adresse des cinq millions de musulmans de France, ces victimes collatérales. L'autre priorité pour la France est de corriger les failles qui handicapent ses services de renseignement. Ce qui est loin d'être une nouveauté. On se rappelle des rapports sur Mohamed Merah, envoyés par la section régionale de la Dcri de Toulouse à sa hiérarchie de Paris qui n'en a pas fait cas. On se rappelle ces «djihadistes» français expulsés par la Turquie et que les services français, pourtant avisés, n'ont pas intercepté à leur atterrissage en France. L'autre énigme est ce terroriste Coulibaly, tué, samedi dernier, dans le magasin de la Porte de Vincennes où il s'était retranché avec plusieurs otages et qui avait été reçu en 2009 à l'Elysée par Nicolas Sarkozy alors même que ses antécédents terroristes dans «la filière des Buttes-Chaumont» étaient connus. Ce même Coulibaly qui a surgi, de nulle part, en sniper pour transformer ce qui était la veille, une agression contre la liberté de la presse en une agression antisémite le lendemain. D'autres erreurs comme celle du Premier ministre, Valls, qui entonne «nous sommes tous Charlie, tous policiers, tous des juifs» mais qui oublie les musulmans de France. Manière de les exclure au même titre que les Français du FN. Hier, la journée était historiquement inédite au pays des droits de l'homme. 66 millions de personnes, une cinquantaine de chefs d'Etat et de gouvernement ont défilé côte à côte, en France, contre le terrorisme. Ceci dit et pour les premières victimes du terrorisme, que nous sommes en Algérie, ce rassemblement mondial à Paris revêt pour nous une signification particulière. Le plus important, cependant, est attendu des décisions des «marcheurs» une fois rentrés chez eux!