Entre les deux chefs d'Etat existe une grande convergence de vues Les spécialistes français du Maghreb pensent sincèrement que la France a bien fait de compter l'Algérie parmi ses alliés stratégiques dans la région du Maghreb. Précédée par des avancées notables sur les dossiers malien et libyen et par un intense échange ministériel entre hommes d'affaires algériens et français, la visite, aujourd'hui du président François Hollande à Alger, est certainement destinée à faire le point sur les questions régionales et bilatérales. Le chef de l'Etat français qui ne sera pas accompagné par une délégation de patrons, comme nous l'ont signalé des sources diplomatiques, vient donc à Alger pour échanger des points de vue avec son homologue algérien. En effet, la délégation présidentielle comprend le ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius et une dizaines d'élus et de personnalités. Cette composante traduit le niveau d'excellence atteint par les relations algéro-françaises, au sens où les questions de détail sont laissées aux Exécutifs qui s'en acquittent très bien, preuve en est la densité des échanges économiques, les deux chefs d'Etat se concentrant sur les aspects plus stratégiques des relations entre les deux pays. En effet, les présidents Bouteflika et Hollande n'évoqueront pas les projets Renault, Lafarge ou autres, mais discuteront des perspectives futures pour donner une assise solide au partenariat multiforme, bilatéral et des actions communes destinées à stabiliser toute la région euro-maghrébine. Et pour cause, c'est bien l'alliance des deux pays qui a ramené la paix au Mali. Les spécialistes français du Maghreb pensent sincèrement que la France a bien fait de compter l'Algérie parmi ses alliés stratégiques dans la région du Maghreb. Le poids avéré du plus grand pays d'Afrique impose à l'ancienne puissance coloniale de reconnaître la nouvelle donne géostratégique. C'est d'ailleurs, ce qu'a fait le président Hollande, dès son arrivée à l'Elysée. Et si aujourd'hui, il vient en ami discuter avec son vis-à-vis, Bouteflika, c'est qu'un bon bout de chemin a été parcouru dans ce sens. Côté algérien, on se félicite de cette évolution de la position française, tout en relevant l'importance de l'aspect bilatéral, notamment. «La coopération et le partenariat algéro-français enregistrent (...) ces dernières années, des avancées importantes et se projettent vers d'autres progrès dans plusieurs secteurs, comme en témoignent les conclusions de la 2e session du Comité intergouvernemental de haut niveau, tenue à Paris en décembre dernier», constate la présidence de la République dans un communiqué rendu public, hier. Non sans énumérer les diverses rencontres de haut niveau, comme pour signifier la constance de ces relations que François Hollande vient confirmer, mais aussi approfondir et leur faire passer, avec Abdelaziz Bouteflika, le point de non-retour. En effet, de tout temps passionnées, ces relations ne sont pas à l'abri d'une «méchante grippe», en cas de changement de majorité en France. Les nostalgiques de l'Algérie française, s'ils ont décampé de l'Elysée, restent tapis dans les recoins xénophobes du système politique français. Même si le président français avait clairement souligné le caractère «profondément injuste, brutal et destructeur» de la colonisation, relevant que «rien ne peut justifier les agressions commises contre la population algérienne, la négation de son identité et de son aspiration à vivre libre», il reste encore en France des résidus d'«Algérie française». Dépasser le point de non-retour revient à construire une destinée commune au niveau bilatéral, mais aussi aux plans régional et international. Dans son communiqué, la présidence de la République retient, en effet, que «les entretiens que le président de la République aura avec son homologue français permettront aux deux chefs d'Etat d'examiner plusieurs questions régionales et internationales d'intérêt commun relatives à la sécurité et à la paix en Afrique et au Moyen-Orient, ainsi qu'à la coopération multilatérale mondiale». Tout un programme en somme, mais qui ne relève plus de l'impossible au regard du rapprochement exceptionnel et historique entre Alger et Paris. Les deux pays sont à un jet de pierre de réaliser le «rêve fou» d'édifier un véritable pont historique entre les deux sociétés, algérienne et française. Tous les ingrédients d'une fondation effective des relations algéro-françaises sont réunis, la coopération économique de plus en plus affirmée, une entente politique parfaite, une vision convergente de l'histoire commune des deux pays et une double position géostratégique idéale entre l'Europe, l'Afrique, le Maghreb et le Moyen-Orient. La France sait qu'elle a beaucoup à y gagner et François Hollande a compris que la sincérité et l'humilité sont le seul chemin pour réaliser ce «rêve de grandeur», pas seulement de la France, mais avec une Algérie indépendante, forte et moderne.