Les pères de famille ne savent plus où donner de la tête Le coût du Ramadhan relèverait donc d'un tabou national même si tous, observateurs et spécialistes, partagent le constat que le mois sacré est synonyme d'un coma national et que le pays fonctionne en mode ralenti. «C'est au lendemain de la fête qu'on se gratte la tête», dit l'adage populaire. Après une frénésie des dépenses et de consommation, le Ramadhan tire à sa fin et c'est l'heure des comptes. Comment en effet, quantifier le coût du Ramadhan, combien coûte-t-il à l'économie nationale? Curieusement, la question n'a jamais été abordée officiellement et à plus forte raison en cette période d'affaissement des rentrées en devises et de la campagne menée par le gouvernement pour la rationalisation des dépenses. Le coût du Ramadhan relèverait donc d'un tabou national même si tous, observateurs et spécialistes, partagent le constat que le mois sacré est synonyme d'un coma national et que le pays fonctionne en mode ralenti. «Doucement le matin, pas trop vite le soir.» Au niveau des institutions, des entreprises publiques ou privées, l'Algérie ne force pas la cadence. Le travailleur algérien préfère s'acquitter de la dette envers son Dieu en jeûnant ce mois mais fuit son travail. Comme la vie, l'Au-delà est aussi un choix: pourquoi travailler alors puisque quand on jeûne on augmente ses chances d'aller au Paradis? Mais ici-bas, ce sont les patrons et l'économie nationale qui trinquent. L'exercice de la foi, exigerait-elle qu'on réduise les horaires de travail et notre capacité de produire? Les retards et l'absentéisme durant ce mois ont un coût. Selon l'expert en économie, Serraï, cette situation ajoutée aux autres fêtes nationales et religieuses fait perdre au Trésor public la bagatelle de 300 millions de dollars, chaque année. A vau-l'eau toute cette littérature, tous ces rapports des institutions financières, Fonds monétaire international et Banque mondiale alertant sur la grave situation économique dans notre pays. Le poids du conservatisme religieux est si lourd que même l'Etat paye sans rechigner. Il n'est pas question de réveiller les démons de l'islamisme surtout pour le Ramadhan. Que Dieu perpétue la «baraka» du pétrole. On assiste alors chaque année à la même rengaine: d'un côté, le gouvernement qui promet d'achalander les marchés par des importations massives et de maîtriser les prix par des contrôles rigoureux, mais les promesses n'engagent que ceux qui les croient. De l'autre, le citoyen qui crie à une flambée exagérée en ce mois sacré. Dans cette ambiance de coma national, le cerveau étant en berne, c'est plutôt le tube digestif qui se trouve trop sollicité. Il s'acquitte bien de sa tâche en guidant toute une société. C'est la frénésie des dépenses et c'est la razzia dans les marchés. 12 milliards de DA sont retirés quotidiennement durant le mois de Ramadhan par les clients d'Algérie poste (AP), avec des pics de 20 milliards de DA, durant la dernière semaine, à en croire, Abdenacer Sayah, le directeur général de cette entreprise. En moyenne, les ménages algériens consacrent un budget de 56.000 DA au Ramadhan et les familles aisées près de 90.000 DA, selon un sondage d'opinion effectué par l'Apoce (Association pour la protection et l'orientation du consommateur et son environnement). L'étreinte ne baisse pas avec la fin du Ramadhan puisque les fruits et légumes cèdent la place aux achats des habits de l'Aïd. Selon le même sondage, le budget moyen consacré cette année par les ménages algériens aux vêtements de l'Aïd El-Fitr est de 8000 DA par personne. Concernant les prix des vêtements, il a précisé qu'un pantalon dans la capitale était proposé jusqu'à 4000 DA et une chemise à 2000 DA pour les 16-20 ans. Le prix du Ramadhan est celui du ménage, pas celui de l'économie nationale. Tout le monde, le gouvernement y compris, parle de flambée, de hausse des tarifs, de surcoûts, mais pas de baisse de l'effort, et des dommages des retards et de l'absentéisme. Ainsi va l'Algérie, mais où?