La ville de Béjaïa s'apprête à vivre aujourd'hui au rythme de marches, grèves et rassemblements. Même si les motivations des uns et des autres restent différentes, il n'en demeure pas moins que ces manifestations concourent à la création d'un climat, qui n'augure rien de bon dans une conjoncture faite de manipulations diverses et sournoises. Le pain manque depuis trois jours. Les boulangers, qui ont voulu imposer une augmentation «illégale» du prix de la baguette de pain, débrayent face aux inspections, tout à fait légales, de la direction du commerce et des prix. Ils privent de pain les consommateurs, donnant lieu à une tension sociale. Une tension sociale qui a déjà pris forme à la faveur de la grève qui s'éternise dans les lycées et s'aggrave de plus en plus. Le Cnapeste, qui ne veut rien entendre malgré la satisfaction de l'une de ses revendications, à savoir le départ de trois responsables de la direction, prévoit encore de faire pression en organisant un 3e rassemblement devant le siège de la direction de l'éducation. La grève du Cnapeste, qui achève sa deuxième semaine, a donné lieu à une inquiétude grandissante au sein de la famille de l'éducation, à commencer par les parents qui trouvent injuste le recours à une grève illimitée pour résoudre des problèmes et la prise en otage de leurs enfants, lesquels trouvent dans ce temps libre imposé par la grève une occasion d'orienter leur intérêt vers des questions politiques en tentant d'initier spontanément des manifestations qui, à défaut d'appeler à des solutions aux problèmes posés par les enseignants en vue de la reprise du travail, s'empressent d'aller dénoncer le rejet de l'article portant promotion de la langue amazighe proposé par la députée du Parti des travailleurs, aujourd'hui au centre d'une polémique qui enfle sans cesse, afin de toucher le département de l'enseignement supérieur, à savoir les universités des régions amazighophones. En effet, les étudiants de l'université de Béjaïa s'invitent à la partie. Après concertation dans des assemblées générales, le ton est monté d'un cran depuis hier. La colère du PT contre le rejet de sa proposition de l'article de loi par le Parlement débordera aujourd'hui dans la rue. Les étudiants prévoient de marcher vers le siège de la wilaya pour exiger la promotion de tamazighth et ce en dépit des explications apportées sur ce sujet par les parlementaires de la région. La même réaction a déjà pris forme à l'université de Bouira depuis avant-hier.Sur les réseaux sociaux la polémique bat son plein. Entre ceux qui dénoncent, poussant la tension à son paroxysme et ceux qui tentent d'expliquer que la langue amazighe est prise en charge dans la Constitution un dialogue de sourds s'est installé. Beaucoup de parlementaires se sont prononcés sur ce sujet. Certains se sont contentés de dénoncer ce rejet sans aller au fond du problème, d'autres, en revanche, ont clairement expliqué que «l'article 4 de la Constitution est clair à ce sujet». Celui-ci parle d'une loi organique qui sera promulguée. Elle figure d'ailleurs dans le Plan d'action du gouvernement. Cette loi organise, définira, selon un parlementaire, les fonctions, les modalités de financement et d'application de l'académie de tamazighth rattachée directement à la présidence de la République.