KimJong Un -Donald Trump Ces derniers jours, Pyongyang et Washington ont brusquement durci le ton, reprenant leur rhétorique habituelle dès lors que la Corée du Nord rejetait toute mention d'une dénucléarisation exigée par les Etats-Unis en échange d'un assouplissement des sanctions. Dans une déclaration solennelle à la Maison Blanche, jeudi dernier, le président américain Donald Trump a annoncé la brusque annulation du sommet du 12 juin avec le dirigeant nord coréen Kim Jong Un, à Singapour. Cette rencontre prévue dans moins de trois semaines n'aura donc pas lieu, ce qui a suscité beaucoup de commentaires et de «regrets» en Corée du Sud où on attendait beaucoup de ce sommet. Dans un bref courrier adressé à Pyongyang, le président américain a dénoncé «l'hostilité» du régime nord-coréen, tout en ne fermant pas la porte à une rencontre ultérieure et en rappelant que la Corée du Sud et le Japon sont à ses côtés «pour les coûts associés aux opérations des Etats-Unis, si une situation [...] malheureuse nous était imposée». Cette sortie a commencé à se dessiner depuis plusieurs jours déjà, lorsque Trump a fait planer le doute sur le sommet de Singapour au moment où il recevait à Washington le président sud-coréen. Si la Russie et la France ont regretté cette décision, lors d'une conférence de presse commune tenue par les présidents Poutine et Macron à Moscou, ils ont rejoint la Chine pour souligner leur espoir que «le dialogue se poursuive» même si le président américain a jugé qu'»il n'est pas opportun, à ce stade, de maintenir cette rencontre prévue depuis longtemps». Dans sa lettre, Trump a fait grief à Kim Jong Un d' «une série de promesses non tenues», avant de le mettre en garde contre «tout acte irresponsable», faisant valoir «la puissance» de l'arsenal nucléaire américain et offrant une échappatoire en concluant: «Si vous changez d'avis concernant cet important sommet, n'hésitez pas à m'appeler ou à m'écrire.» Ces derniers jours, Pyongyang et Washington ont brusquement durci le ton, reprenant leur rhétorique habituelle dès lors que la Corée du Nord rejetait toute mention d'une dénucléarisation totale exigée par les Etats-Unis en échange d'un assouplissement des sanctions. Puis il y a eu de l'eau dans le gaz avec la déclaration de la vice-ministre nord-coréenne des Affaires étrangères, Choe Don-hui qui a traité d'«andouille» le vice-président américain Mike Pence parlant d'une condition sine qua non de la dénucléarisation, faute de quoi le sommet serait annulé et la Corée du Nord exposée à de graves sanctions. Selon Pence, «ce serait une grave erreur pour Kim Jong-un de penser qu'il pourrait se jouer de Donald Trump», assurant que la Corée du Nord pourrait finir comme la Libye de Maammar al Gueddhafi. «Je ne peux pas cacher ma surprise devant de telles remarques idiotes et stupides venant de la bouche du vice-président américain», a fustigé jeudi Choe Son-hui, dans une déclaration publiée par l'agence officielle Kcna. L'annulation unilatérale du sommet est mal ressentie par Kim Jong Un car elle est intervenue le jour même où il montrait à la presse internationale conviée pour l'occasion la destruction de son site d'essais nucléaires. Ce geste de bonne volonté, promis lors de la rencontre avec le président sud coréen sur la ligne de démarcation entre les deux Corées, a été savamment préparé et la décision du président américain a pris l'allure d'une volte-face humiliante. Pyongyang a en effet «complètement» démantelé le site d'essais de Punggye-ri, dans le nord-est, selon le communiqué de l'Institut pour les armes nucléaires repris par l'agence officielle Kcna. De son côté, l'ONU a «regretté l'absence d'experts internationaux» pour vérifier la destruction effective d'une infrastructure qui pourrait, selon certaines informations occidentales, avoir subi de sérieux dégâts durant le dernier tir. Tandis que la Chine, la Russie et la France appellent à la poursuite du dialogue et prônent le sens des responsabilités, le président américain a, vingt quatre heures à peine après avoir annulé le rendez-vous de Singapour, rétropédalé comme à son habitude en annonçant hier que des discussions étaient en cours avec Pyongyang et que la rencontre pourrait, malgré tout, «avoir lieu le 12» juin, comme initialement prévu. «Nous leur parlons en ce moment», a-t-il déclaré depuis les jardins de la Maison Blanche. «Ils veulent vraiment le faire. Nous aimerions le faire. Nous verrons ce qui va se passer», a-t-il ajouté, ajoutant que la rencontre «pourrait même avoir lieu le 12». Simple tactique pour surenchérir ou volonté d'accroître les pressions sur Kim Jong Un, la stratégie du président américain a de quoi nourrir le scepticisme. Le dirigeant nord-coréen a vite fait de saisir l'occasion pour donner davantage de vigueur à la coopération avec la Chine, tout en se rapprochant de la Corée du Sud. Côté américain, un jour seulement avant l'annonce de Trump, les responsables rivalisaient d'optimisme sur la tenue du sommet historique malgré des ultimatums et des menaces apocalyptiques envers Pyongyang pour obtenir sa dénucléarisation. Finies donc les démonstrations de bonhomie amicale et place à un nouvel imbroglio politique que le président Trump gère avec sa méthode peu orthodoxe et son caractère très versatile. Confiante dans la tenue du sommet, la Corée du Nord avait libéré trois détenus américains, gelé ses tirs de missiles balistiques et détruit son seul site connu d'essais nucléaires pour que, la poussière des explosions à Punggye-ri à peine retombée, M.Trump annonce la mort du sommet dans une lettre transmise à M. Kim. On imagine l'ambiance qui régnera au cas où la rencontre aura vraiment lieu.