La crise algéro-espagnole risque d'avoir des effets dévastateurs sur l'économie ibérique qui se remet très difficilement des deux années de pandémie. La Banque d'Espagne est passée aux aveux en exprimant publiquement, avant-hier, son inquiétude quant aux conséquences de la crise diplomatique avec l'Algérie. «Non seulement cette crise constitue un problème géopolitique important mais peut également avoir des conséquences importantes sur l'économie espagnole», a averti la plus importante institution du pays qui a d'ailleurs révisé ses projections pour l'économie espagnole, afin d'intégrer les événements de ces dernières semaines. Dans les milieux d'affaires, c'est la bérézina. Les errements du gouvernement espagnol leur ont fait perdre un marché de 3 milliards de dollars! C'est le montant des exportations espagnoles vers l'Algérie en 2020, alors que le monde était en pleine crise pandémique. Avec le net reflux de la pandémie, l'aisance financière dont jouit l'Algérie en raison de la guerre en Ukraine, un Eldorado s'offrait aux entreprises espagnoles qui avaient l'avantage de la proximité et des échanges qui tournaient à plein régime. L'Espagne était le troisième client de l'Algérie après l'Italie et la France et son cinquième fournisseur derrière la Chine, la France, l'Italie et l'Allemagne. Le gouvernement de Pedro Sanchez qui a brusquement changé la position historique de l'Espagne par rapport au Sahara occidental, ignore-t-il à ce point la densité des intérêts de son pays avec l'Algérie? Manque-t-il à ce point d'anticipation pour sous-évaluer les conséquences d'une réaction de son partenaire de la rive sud? «Au fond, c'est «une ignorance totale de ce que signifie l'Algérie et de la manière de traiter avec ce pays», a expliqué le journal on-line El Independiente. En effet, l'Algérie n'est pas n'importe quel partenaire de l'Espagne au vu des conséquences qui découlent des représailles commerciales et économiques. La suspension du Traité d'amitié, de bon voisinage et de coopération suivie d'une note de l'Association des banques et établissements financiers (Abef), le gel des domiciliations pour les opérations commerciales de et vers l'Espagne a été durement ressentie. Au moins 500 entreprises ont subi les contrecoups de cette action. Elles ont vu leurs commandes gelées après l'annonce par l'Algérie de suspendre le Traité d'amitié avec l'Espagne et les pertes sont estimées à des millions d'euros. La crise prend des proportions inattendues. Si depuis mars, le gouvernement socialiste de Pedro Sanchez gère une contestation circonscrite au niveau d'une partie de la classe politique, la donne a maintenant changé. L'Espagne est divisée sur la décision de Pedro Sanchez de provoquer une escalade avec Alger. Pedro Sanchez doit faire face désormais à la grogne du monde des affaires de son pays. Par les leviers économique et commercial qu'elle a agités, L'Espagne a bien évalué, après coup, la place importante qu'occupe l'Algérie dans son secteur économique. C'est ce qui explique la panique de Madrid qui, sous les feux de l'action, a aggravé son cas en allant se plaindre à Bruxelles. C'est le point de non-retour, et la crainte d'une restriction des livraisons de gaz est réelle. L'Algérie a fourni 35,8% du gaz importé par l'Espagne au cours des douze derniers mois et en 2021, ce pourcentage a approché les 43%. L'Espagne a réduit ses importations de gaz algérien, ces derniers mois, mais continue d'être le principal fournisseur de gaz, selon ABC. La Banque d'Espagne a noté qu'une éventuelle restriction des livraisons de gaz en provenance d'Algérie aurait un «effet sensible» à la fois sur la croissance économique et sur l'inflation.