La Technologie Blokchain peut-elle être la clé de la numérisation de l'économie algérienne? La bancarisation de la totalité des agents économiques algériens pourra-t-elle se faire grâce à une innovation technologique majeure comme la création du dinar numérique? En ce début d'année 2023, nous entrons encore plus dans une économie de l'instantané, les échanges mondiaux se font à la vitesse de l'éclair et l'Algérie ne peut pas rester plus longtemps sur le banc des retardataires. Avec l'accélération des échanges, la numérisation des paiements et la bancarisation des Algériens,ce sont là des défis que l'Algérie doit relever pour que son économie réponde aux enjeux de demain. La banque d'Algérie a fêté son 60 ème anniversaire et comme l'a souligné le Premier ministre, Aïmene Benabderrahmane, lors de son allocution, «la banque d'Algérie oeuvre à créer une monnaie numérique nationale sous le nom de «Dinar numérique algérien». La technologie Blokchain permet d'effectuer et d'enregistrer des transactions sous format numérique sans avoir nécessairement recours à un tiers de confiance (une banque par exemple). L'information se trouve inscrite dans des blocs de transaction, ce qu'on appelle la chaîne de blocs, chaque bloc étant relié par son identifiant au bloc précédent. Parmi les Blokchains célèbres on retrouve le Bitcoin dont l'achat, la vente, l'utilisation et la détention sont interdits en Algérie depuis 2018. Le projet algérien s'oriente vers la mise en place et l'adoption d'une forme numérique de la monnaie dont la banque d'Algérie sera le principal émetteur. Dans cette configuration, le tiers de confiance restera toujours la banque, ce qui permettra d'avoir un contrôle sur la gestion, la sécurisation et l'adoption massive du dinar numérique. On appelle cela une Monnaie numérique de Banque Centrale (Mnbc). Cette démarche des autorités algériennes est tout à fait légitime, et nous pouvons saluer cette prise de conscience pour ce projet ambitieux qui est l'un des fondamentaux de l'économie mondiale. La création de ce dinar numérique aura, notamment pour objectif de soutenir la forme physique de la monnaie fiduciaire. Comment expliquer ce revirement de situation? L'Algérie veut créer un Dinar numérique alors qu'elle avait interdit depuis 2018 l'utilisation et la détention des monnaies numériques. Nous le savons aujourd'hui, les cryptomonnaies comme le Bitcoin ont été créées dans le but de s'émanciper du pouvoir des autorités et des banques, notamment des banques centrales et des banques internationales. L'objectif étant d'avoir une monnaie complètement indépendante du système financier mondial. Sachant qu'aucun Etat au monde ne pourra empêcher le développement de ces différentes monnaies numériques, Il est nécessaire que les banques centrales émettent leur propre monnaie numérique sur laquelle elles garderont le contrôle. Depuis 2021, il existe plusieurs exemples en Afrique, comme le Nigeria, le Ghana ou l'Afrique du Sud qui ont déjà commencé à émettre leur propre monnaie numérique, avec l'eNaira ou l' e-Cedi. Contrairement aux cryptomonnaies décentralisées comme le Bitcoin, ces monnaies numériques de banques centrales ne sont pas contrôlées par les internautes ou par un réseau parallèle. Il s'agit d'une version numérique des pièces et des billets de banque, plus sûre et moins volatile que des cryptoactifs, car la monnaie numérique est émise et régulée par une banque centrale. Le système économique et financier algérien a beaucoup de similitudes avec ces économies africaines où l'on observe un faible taux d'inclusion financière et de bancarisation. La décision du gouvernement algérien est intelligente, mais aussi nécessaire pour que l'Algérie construise une position incontournable dans le commerce mondial. Cependant, la mise en oeuvre d'un tel projet sera déterminante pour sa réussite. Nous savons que le paiement par carte bancaire est très compliqué en Algérie et il est difficile de trouver un terminal de paiement électronique dans les commerces de proximité. Depuis la loi de finances 2018, il y a une réelle difficulté d'imposer à tous les commerçants un terminal de paiement électronique pour permettre aux clients de payer de façon dématérialisée. Les pays qui utilisent des monnaies numériques ont déjà une population habituée au paiement par téléphone mobile, et au paiement en ligne. En Algérie le paiement mobile doit se développer pour aider la population à accepter et se familiariser avec ce procédé de règlement. Les restrictions de la Satim (Société d'automatisation des transactions interbancaires et monétique) concernant le paiement en ligne doivent être revues en Algérie pour alléger et faciliter l'accès à un maximum d'agents économiques. L'enjeu est de taille, l'instauration d'un Dinar numérique nécessitera de faire évoluer notre système pour lui permettre de se généraliser et de fonctionner efficacement. Le gouvernement et la banque d'Algérie doivent créer un environnement économique propice pour développer le paiement mobile et le paiement en ligne, qui contribueront à la réussite du projet de numérisation du pays.