La culture peut-elle se suffire, sans aucun apport financier ou matériel extérieur ? En Algérie, existe-t-il réellement une politique de promotion de la culture de la part de particuliers ? Et si c'est le cas, comment peut-on définir cette action : mécénat ou sponsor ? C'est à cette dernière question qu'a tenté de répondre Aïssa Belmeki, économiste, lundi passé au café littéraire l'Île lettrée, à Alger, lors d'un débat ayant pour thème : “Sponsor ou mécénat pour la culture ?” Cette rencontre a été modérée par Moncef Kaïdi (ancien journaliste). Après une brève présentation, l'intervenant aborde le sujet, en affirmant : “Ce thème est complexe comme toutes les thématiques et problématiques.” Et d'ajouter, toujours à propos de ce thème : “Il y a une grande confusion sémantique” en ce qui concerne la conception qu'on a parfois du sponsor et du mécénat. À cet effet, et avant d'approfondir le thème, l'orateur donnera la définition de la lexie “mécène”. Pour lui, il faudra “se placer dans le contexte pour comprendre”. Il ajoutera aussi que “les mécènes sont souvent des phénomènes propres à des sociétés données qui ont une civilisation et une politique”. Par ailleurs, il a tenu à préciser qu'il ne faut pas confondre mécénat et sponsoring, “un mot anglais que l'Académie française déconseille”. Pour mieux situer, dans ce contexte, le mot mécène est nom masculin, paru en 1526. Il vient du latin Mæcena, nom d'un chevalier romain du Ier siècle avant Jésus-Christ. C'est un descendant d'une noble famille étrusque. Il fut le conseiller d'Auguste et protecteur des Belles-Lettres, particulièrement de Vigile, Horace et Properce. D'après cette présentation ou définition (tirée du dictionnaire encyclopédique Le Robert, édition 1996), deux assertions se mettent en exergue : le mécénat existe depuis la nuit des temps ; le mécène est une personne qui encourage par ses libéralités les sciences, les lettres et les arts. C'est aussi ce riche amateur, le mécène des artistes. Personne physique ou personne morale qui apporte un soutien matériel, sans contrepartie directe de la part du bénéficiaire, à une œuvre ou à une personne pour l'exercice d'activités présentant un intérêt général. Après cette définition, on comprend mieux la nuance qui est plus que claire. Car, contrairement au mécénat, le sponsor est une aide financière qui a des retombées financières pour celui qui le pratique. À partir de cette précision, il est clair que pour parler de mécénat, il faut qu'une politique de la chose culturelle existe. Car c'est un phénomène social qui répond à des données politiques bien précises. Ledit phénomène existe bel et bien en Occident et même dans certains pays arabes. Même en Algérie, le mécénat culturel a existé. Toutefois, toujours selon l'intervenant Aïssa Belmeki, “il y a un problème politique qui se pose : le système politique algérien est un système rentier”. De ce fait, “la chose culturelle est rabaissée”. Allant encore plus loin, l'orateur dira que “durant 132 ans de colonialisme, le peuple algérien n'avait pas de destinée en main. Il était privée de ce droit à l'autodétermination”. Et d'ajouter : “Après l'indépendance, il y a eu un système de politique importé : le socialisme.” Ce qui a donné une gestion centralisée administrative. Campant sur son raisonnement, il affirmera que ce “système importé” a “foiré” car, avec “l'économie du marché, la chose culturelle est passée au bas de la liste. L'argent est devenu le critère de valorisation social”. Mais commet y remédier ? Le modérateur, Moncef Kaïdi, dira que si on veut parler de mécénat, “il faut être humaniste. (…) C'est une culture qu'il faut faire revivre !” Car, selon lui, “une fois mis face au défi, certains vont se détacher et y participer !” Et d'ajouter : “Il faut cultiver ce sentiment d'humaniste et de philanthrope.” Quant à M. Belmeki, il donnera l'exemple de la société ibadite du M'zab qui, elle, pratique le mécénat dans son sens le plus large. Mais peut-on réellement parler de mécénat en Algérie ? M. Belmeki affirmera le contraire, car “actuellement, la politique ne le permet pas” car nous sommes dans “une société de dépendance”. En fait, avant de parler de “sponsor ou de mécénat pour la culture”, il est plutôt primordial de rectifier le tir vis-à-vis de la culture, lui [re]donner ses lettres de noblesse et lui accorder plus d'importance. Ne dit-on pas qu'une société est jaugée grâce à sa culture ?