Saiyed n'avait d'yeux que pour sa cousine Hizia. Descendante des tribus des Beni Hilal qui régnèrent au XIXe siècle sur toute la région des Zibans, cette jeune fille, au charme envoûtant, appartenait à la famille des Bouakkaz, de la puissante tribu des Dhouaouda. Née vers 1852, Hizia affichait une beauté insolente qui attisait la jalousie des filles et réveillait le désir des hommes candidats au mariage. Mais son petit cœur à elle ne battait que pour son cousin Saiyed. Orphelin, ce dernier avait été élevé par le propre père de Hizia : Ahmed Ben El Bey, un notable respecté de la tribu. Le mariage des deux tourtereaux fut célébré. Hizia était éblouissante dans ses 23 printemps. Hélas, le bonheur du couple était compté. Un mois, c'est le temps que dura cette passion brûlante. La belle Hizia succomba à un mal mystérieux à Oued Tel à une cinquante de kilomètres de Sidi Khaled. Elle revenait avec sa tribu d'un séjour saisonnier dans le nord. Fou de douleur, Saiyed sombra dans une dépression proche de la démence. Quelques jours après, il rendit visite au poète Rabah Benguitoun à Sidi Khaled. “Il faut que tu composes un poème à la hauteur de la beauté de ma dulcinée et du chagrin qui me dévore”, lui dit-il. Le maître du melhoun écouta son histoire. C'est ainsi que naquit l'un des plus beaux poèmes d'amour inscrit dans la tradition orale populaire : “Amis consolez-moi, je viens de perdre la reine des belles. Elle repose sous terre. Un feu ardent brûle en moi. Ma souffrance est extrême. Mon cœur s'en est allé, avec la svelte Hizia”… Hanté par le souvenir de son amour perdu à jamais, Saiyed s'exila loin de sa tribu, jusqu'à sa mort. Quant au poème écrit à la fin de l'année 1878, il est devenu une belle histoire d'amour chanté par une pléiade d'artistes tels que Abdelhamed Ababsa, Khelifi Ahmed ou encore Rabah Driassa. NADIA AREZKI [email protected]