L'ordre et la bienséance semblent avoir déserté l'école. Mais il serait trop expéditif d'en accabler le seul système éducatif tant il est vrai que l'éthique et les bonnes vieilles pratiques qui en relèvent ont fini par être évacuées de l'ensemble de l'espace public. Une simple virée faite hier, au deuxième jour des épreuves du bac, dans quelques centres d'examen d'Alger a suffi pour s'en rendre compte : pour peu qu'ils en aient l'opportunité, les candidats n'hésitent pas à recourir à la triche. Ils l'affirment eux-mêmes, ils sont à l'affût de la moindre faille dans le système d'organisation et de surveillance qui leur permettrait de passer à l'acte. Ceux qui s'en abstiennent semblent largement minoritaires. Ils avouent pourtant ne pas trop s'encombrer de l'éthique ou de quelque autre scrupule moral ou pédagogique. N'était leur manque de “courage d'oser”, ils auraient fait “comme tout le monde”. On l'a vérifié samedi dernier à Blida : lorsque ce courage ne manque pas, la triche peut alors prendre des allures… détonnantes : pour éviter les épreuves d'un examen de fin d'année, deux étudiants ont provoqué une panique indescriptible à l'université locale en faisant état de la présence d'une bombe dans l'enceinte de l'établissement. En soi, ce procédé qui convoque l'idée de la violence terroriste comme moyen d'éviter un échec pédagogique est révélateur de cette relation bijective entre l'école et la société. Réforme ou pas, l'ordre et la bienséance semblent avoir déserté l'école. Mais il serait trop expéditif d'en accabler le seul système éducatif tant il est vrai que l'éthique et les bonnes vieilles pratiques qui en relèvent ont fini par être évacuées de l'ensemble de l'espace public. S'il est vrai que la défunte Ecole fondamentale a produit sa part de désordre, de violence et de clochardisation sociale, l'institution éducative subit aussi les conséquences de maux sociaux et d'errements politiques dont elle n'est pas la matrice, mais le réceptacle. On le voit, l'essor de la corruption dans la sphère économique et du clientélisme dans la vie politique va de pair avec la triche aux examens pédagogiques. Et lorsque le népotisme et les affinités claniques ou encore les passe-droits, les pots-de-vin et autres dessous-de-tables en arrivent à reléguer le travail au rang de sous-valeur, c'est la culture de la malversation qui triomphe et, alors, la corruption fait école… jusqu'au sein même de l'école.