La justice tunisienne a-t-elle voulu sauver quelque peu la face par rapport aux frondes auxquelles elle fait face ? La décision qu'elle a prise avant-hier prouve un tant soit peu qu'elle n'est pas si mauvaise. Pas tant que ça. Vendredi, elle est arrivée à lever l'interdiction faite à la chaîne télévisée Ettounsiya de diffuser une interview de Slim Chiboub, gendre du président déchu Zine El-Abidine Ben Ali. En fait, le tribunal est revenu sur sa première décision qui avait déclenché des accusations de censure. Moez Ben Gharbia, le présentateur de l'émission concernée, était le premier à avoir lancé un hourra. “Nous avons gagné (...) Nous diffuserons l'interview quand nous le voudrons", a-t-il déclaré à Radio Express-FM sans préciser de date. Selon les radios les plus écoutées, Mosaïque et Shems FM, le contentieux de l'Etat avait déposé une requête en urgence demandant d'interdire la diffusion de l'interview, jeudi soir. Une demande qui a été acceptée. Vendredi, une seconde requête a demandé que l'interdiction soit étendue à toutes les chaînes du pays et sur internet. Or, cette plainte a été rejetée, et la décision a aussi libéré la chaîne Ettounsiya de l'interdit. En revanche, des personnalités politiques et des médias avaient qualifié la décision comme un retour à la censure du temps de Ben Ali. Tahar Ben Hassine a indiqué être prêt à diffuser l'interview de Slim Chiboub à la place d'Ettounsiya TV dès vendredi 21h. “Nos acquis sont menacés, s'ils (les islamistes d'Ennahda qui dirigent le gouvernement) veulent me poursuivre, qu'ils le fassent", a-t-il dit. Le Premier ministre Hamadi Jebali (Ennahda) avait pour sa part dénoncé l'interview comme “un prélude à une ‘normalisation' planifiée des symboles de l'ancien régime" et a promis que “ce plan machiavélique" ne sera pas toléré. Ancien champion de volley-ball et homme d'affaires surnommé “Monsieur Gendre", Slim Chiboub a présidé de 1989 à 2004 le club omnisports de l'Espérance sportive de Tunis (EST), dont l'équipe de football est l'une des plus populaires du pays qui, selon une bonne partie des Tunisiens, a été nourrie par l'argent sale du clan Ben Ali-Trabelsi. Le gendre de Ben Ali s'est réfugié aux Emirats arabes unis, où il a été condamné par contumace, en mars dernier, à cinq ans de prison pour détention d'arme à feu sans autorisation. I. O.