Après une absence de près de huit mois, suite à l'attaque terroriste dont a fait l'objet le site gazier de Tiguentourine, la compagnie pétrolière britannique British Petroleum (BP) a décidé de reprendre ses activités en Algérie. Cette décision prendra forme bientôt avec le retour de son personnel. L'annonce émane de l'ambassadeur du Royaume-Uni en Algérie, Martin Roper. "BP est toujours engagée à poursuivre ses activités en Algérie. Dans ce contexte, le personnel de cette compagnie sera bientôt de retour", a indiqué M. Roper à l'issue de la cérémonie de signature des accords entre l'entreprise Sonelgaz et des institutions britanniques dans le domaine de la formation. Au lendemain de l'attentat perpétré par des terroristes en janvier dernier contre le complexe et qui a fait 38 morts, BP, partenaire de Sonatrach dans ce projet, a rapatrié aussitôt ses employés. Sans l'annoncer de manière officielle, le groupe pétrolier a, depuis, gelé ses investissements en Algérie. Sonatrach soutenait mordicus qu'elle n'a pas été saisie officiellement par son partenaire britannique quant à sa décision de reporter deux projets gaziers à In Amenas et In Salah. L'on suppose que cette question a été au centre des discussions qu'a eues le ministre délégué auprès du ministre de la Défense nationale (MDN), Abdelmalek Guenaïzia, avec le représentant spécial du Premier Ministre britannique pour le partenariat économique avec l'Algérie, Lord Richard Risby, qu'il a reçu hier au siège du ministère. Les entretiens "ont porté sur des questions d'intérêt commun", a souligné le ministère dans un communiqué. Et la relance des activités de BP serait vraisemblablement l'une d'elles (questions). Les projets industriels initiés par le MDN en partenariat international pourraient être aussi un autre sujet abordé au cours de cette entrevue entre les deux officiels. Tout porte à croire que les deux parties sont parvenues à un consensus, sanctionné par l'arrivée prochaine des effectifs de la firme britannique. Il y a quelques mois, un tel accord était encore impossible. Car chacun des deux camps... campait sur sa position en avançant des arguments béton. BP avait demandé à la compagnie pétrolière nationale des conditions de sécurité performantes pour poursuivre ses investissements dans les délais impartis. Garanties sécuritaires : la pomme de discorde ! Les autorités algériennes, pour leur part, ont refusé que le groupe britannique assure lui-même la sécurité de ses sites par le biais de sociétés de gardiennage étrangères. En mars dernier, les pouvoirs publics ont chargé des agents de sécurité de l'Etat de protéger les sites économiques détenus par des étrangers. L'une des dernières mesures prises par l'Algérie consistait en la création de plates-formes d'atterrissage pour petits avions afin de pouvoir transférer directement les personnels de Hassi-Messaoud vers la base de Tiguentourine. Ce qui éviterait les transferts par bus de Tiguentourine vers l'aéroport d'In Amenas et d'éliminer par là même le risque d'agression. Car, faut-t-il le rappeler, l'attaque terroriste contre le complexe a débuté par un raid contre un bus transportant des employés étrangers vers l'aéroport. Pour les responsables algériens, le site est hyper sécurisé et les réticences de BP ne sont guère justifiées. Mieux, ils estiment que les exigences de cette firme sur certains domaines relèvent de la souveraineté nationale. Or, le fait que la société britannique et l'autre partenaire norvégien Statoil aient perdu quelques éléments dans cette attaque les a poussés à exiger des garanties sécuritaires optimales. BP a tardé à revenir à In Amenas, selon certaines sources, en raison du refus de Sonatrach de lui notifier par écrit les nouvelles dispositions prises pour sécuriser le site. Sonatrach aurait répondu que les mesures prises sont de nature "confidentielle" et ne peuvent de ce fait être révélées. Un dialogue de sourds s'en est alors suivi pendant une longue période. Le retour des travailleurs de BP met fin ainsi à huit longs mois de négociations qui ont opposé la firme britannique et les autorités algériennes quant à la poursuite de la production de l'usine d'In Amenas. La base gazière ne fonctionnerait actuellement qu'avec un seul train de production qui produit 7 millions de m3/j. Avec l'exploitation des deux autres trains, la production s'élève à 30 millions m3/j. L'apport de l'usine gazière de Tiguentourine reste considérable puisqu'elle représente 18% des exportations du pays. Des observateurs très au fait du secteur des hydrocarbures avouent que le groupe britannique, à travers ses requêtes incommensurables, chercherait un deal pour obtenir de nouveaux avantages du gouvernement algérien. Il évoque l'augmentation de ses dépenses avec la hausse des primes d'assurance de ses employés, suite à l'attaque. Cela étant, le quotidien El Khabar, citant une source proche de Sonatrach, a affirmé récemment que les compagnies pétro-gazières BP et Statoil ont informé les autorités algériennes, ainsi que la compagnie nationale de la reprise progressive de leurs activités sur le site gazier de Tiguentourine à partir du 15 septembre prochain. Ces deux firmes vont gérer leurs projets à partir de Hassi-Messaoud en programmant des visites périodiques sur ces sites sans rester sur place afin de s'assurer de l'efficacité des mesures de sécurité prises par l'Algérie dans ce sens. Elargir la coopération bilatérale vers d'autres secteurs Et la rentrée des cadres se ferait progressivement à commencer par les directeurs d'exploitation qui seraient rejoints par tous les travailleurs d'ici à la fin de l'année en cours. Maintenant que l'affaire a connu un dénouement favorable aux deux pays et le problème des garanties sécuritaires est réglé, place à la coopération économique et commerciale dans les autres secteurs. À ce propos, l'Algérie a émis le vœu de diversifier ses partenariats avec les Britanniques en dehors des hydrocarbures. Le ministre de l'Industrie, de la PME et de la Promotion de l'investissement, Chérif Rahmani, a pour cela proposé l'élaboration d'une feuille de route afin de définir les domaines de partenariat économique entre les deux pays. Ce plan de travail définira les possibilités de partenariat secteur par secteur et projet par projet pour aboutir à un programme de coopération bilatérale à long terme, a noté Chérif Rahmani. Le ministre a vanté le modèle de gestion britannique des établissements hospitaliers et des grandes sociétés publiques fondé sur la rigueur et l'expertise qui intéresserait à plus d'un titre l'Algérie. "Nous sommes très intéressés de développer avec le Royaume-Uni des relations dans le domaine des services. Nous sommes aussi intéressés de développer avec ce pays une coopération dans le domaine du tourisme", a précisé, pour sa part, le ministre des Affaires étrangères, Mourad Medelci, dans une déclaration à l'issue de l'audience qu'il a accordée à Richard Risby. Que cette coopération s'élargisse, suggère-t-il, vers d'autres domaines tels que l'industrie liée aux énergies renouvelables. De son côté, Lord Risby a signifié que son pays ne voulait pas soutenir l'échange commercial uniquement mais nouer des partenariats sous forme de projets d'investissement. "De nombreux investisseurs britanniques veulent travailler en Algérie, un pays qu'ils considèrent comme stable et prospère", a-t-il déclaré. Un pas vient d'être franchi d'ailleurs pour concrétiser toutes ces bonnes intentions. Il s'agit des deux protocoles d'accord signés hier entre le P-DG de Sonelgaz et le représentant du Premier Ministre britannique. Le premier accord a trait au développement d'un outil d'évaluation énergétique et des émissions à l'horizon 2050, le deuxième vise à développer un programme académique de formation pour les gestionnaires de Sonelgaz et ses sociétés filiales en vue de concrétiser le projet de création en Algérie d'une grande école des hautes études en management en langue anglaise avec l'université britannique Cranfield. B K Nom Adresse email